samedi, janvier 13, 2007

N°213 - Journal de Palestine - Special dossier : 13-01

Dossier
3-1 Point de vue de Rami G. Khouri : La domination d'Israël pourrait lentement se renverser.

3-2 Point de vue de Tariq Ramadan : Palestine, Israël et la conscience planétaire.

3-3 Point de vue de Zvi Bar'el : Quand Tzipi Livni cisèle ses formules.
4 Courrier des lecteurs & trouvé sur le net

4-1 La Paix Maintenant : Réaction aux dire de Khaled Mesh'al.

4-2 Benjamin Barthe : Les deux Palestine : l'unité en lambeaux.

4-3 Karim Lebhour :, Les check-points "servent à nous humilier"

4-4 Point de vue de Dr Christian Phaneuf : Israël et le traité de non-prolifération ? l 'Onu fait montre d'hypocrisie.!

4-5 Shraga Blum : Tsahal manque cruellement de crédits pour les défis à venir...

5 Annexe
5-1 Point de vue de René Naba’a : De l’accusation d’antisémitisme comme arme de dissuasion.

5-2 Interview d'Ilan Pappé : 'il ne faut pas confondre le Judaïsme et le Sionisme.

5-3 Salman Abu Sitta ; Traces de poison : La sombre histoire d'Israël.

5-4 Rémi Kauffer : Les dérapages du nationalisme juif.



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3 Dossier

Ndlr : PS : La publication des articles ou analyse ne signifie nullement que la rédaction partage les analyses ou point de vue des auteurs, mais doit être vu comme information

3-1 Point de vue de Rami G. Khouri : La domination d'Israël pourrait lentement se renverser.

(partie palestine)

Bien des éléments pourraient faire croire que les Israéliens sont en train de gagner la guerre palestino-israélienne. Ils contrôlent et colonisent les terres arabes, jouissent de la supériorité militaire et du total soutien américain, et définissent unilatéralement la plupart des paramètres diplomatiques du conflit. Pourtant, cette analyse est peut-être erronée : les Palestiniens et les Arabes sont peut-être en train de commencer à gagner quelques batailles, en même temps qu'Israël est en train de perdre de son influence. Sept événements, au cours des cinq derniers mois, semblent donner crédit à cette hypothèse.
3) Le troisième développement notable fut lorsque Israël a accepté le cessez-le-feu avec les Palestiniens à Gaza en novembre dernier, après avoir déclaré que cela ne mettrait pas un terme à ses attaques et qu'il ferait le nécessaire pour récupérer le soldat israélien Gilad Shalit, que les guérillas palestiniennes avait enlevé à la frontière entre Gaza et Israël. La juxtaposition des événements de cet été au Liban et à Gaza sont très éloquents. Les prouesses militaires d'Israël, tant vantées, et son effrayante dissuasion n'ont pas réussi à empêcher les combattants libanais et palestiniens d'enlever trois de ses soldats dans les zones frontalières. Des semaines ou des mois après, Israël a ravalé ses paroles, mis de côté ses ultimatums et ses menaces, et accepté, dans les deux cas, les cessez-le-feu.
4) Le quatrième signe récent est qu'Israël a été incapable d'arrêter les roquettes Qassam artisanales tirées par les résistants palestiniens dans le sud du pays. La puissance militaire israélienne et les capacités de ses services secrets – ainsi que l'assassinat de quelques 400 Palestiniens depuis juin – n'ont pas arrêté de jeunes hommes déterminés à tirer leurs roquettes sur Israël.
5) Le cinquième incident remarquable est arrivé début novembre, lorsqu'Israël a coincé un groupe de combattants palestiniens dans une mosquée à Beit Hanoun, dans le nord de Gaza, espérant qu'ils se rendraient ou seraient tués. Au lieu de cela, 200 Palestiniennes ont brisé le siège, envahi la mosquée et fourni aux jeunes combattants les moyens de s'échapper, avec deux femmes tués et une douzaine blessées. La ligne de front qui avait été dessinée par les troupes israéliennes combattant une poignée de jeunes palestiniens s'est transformée dans l'armée israélienne se retrouvant elle-même impuissante – et défaite – en face de la population civile palestinienne.
6) Le sixième incident est intervenue à la mi-novembre, lorsque l'armée israélienne a téléphoné chez un militant palestinien du Camp de Réfugiés de Jabaliya, à Gaza, et a enjoint les habitants d'un immeuble d'habitation de trois étages de le quitter parce qu'il allait être détruit. Au lieu de partir, comme ils le font d'habitude, des centaines de civils ont envahi le bâtiment, se sont installés sur le toit, et ont mis au défi les Israéliens de les tuer tous. Face à des civils qui ne craignaient plus de mourir, la puissante machine à tuer israélienne et ses leaders politiques abasourdis se sont révélés tout d'un coup beaucoup moins impressionnants – car ils avaient perdu beaucoup de leurs capacités d'intimidation.
7) Le septième incident, au début de la semaine, fut la rencontre entre le Premier Ministre israélien Ehud Olmert et le Président palestinien Mahmoud Abbas, où il fut annoncé qu'Israël rendrait 100 millions de dollars de taxes et lèverait quelques check-points en Cisjordanie. Revenant sur son refus initial de faire le moindre geste ou de rencontrer les Palestiniens tant que Shalit ne serait pas libéré, Olmert a rencontré, parlé et fait quelques concessions aux Palestiniens sans que la libération de Shalit soit en vue.

L'histoire dira si ces événements signifient bien sûr un changement dans l'équilibre militaire ou politique de pouvoir dans les confrontations arabo-israéliennes.
Pour l'heure, nous devons espérer que la tendance dégagée lors de ces événements ouvrira les yeux et les cerveaux des dirigeants arabes et israéliens qui ont principalement compté sur la force militaire pour atteindre leurs objectifs, et les poussera plutôt sur le chemin des négociations, voie plus efficace pour obtenir leurs droits, et vivre une vie normale dans la paix, la sécurité et la reconnaissance mutuelle.

Sources ISM

Posté par Adriana Evangelizt



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3-2 Point de vue de Tariq Ramadan : Palestine, Israël et la conscience planétaire.
Il devient de plus en plus clair que le conflit israélo-palestinien est central pour la paix dans le monde et pour promouvoir une meilleure entente entre les sociétés musulmanes et l’Occident.

Même le premier ministre britannique Tony Blair l’a relevé récemment sur al-Jazeera alors même qu’il s’exprimait sur la détérioration de la situation en Irak. Or, nous sommes aujourd’hui au bord de la guerre civile et l’annonce d’élections anticipées par la Président Mahmoud Abbas a provoqué une flambée de violence avec le refus catégorique des élus du Hamas et d’une partie de la population d’accepter cette solution. La situation est catastrophique et la paix est très éloignée.

On aurait pu espérer qu’avec la disparition de la scène politique de Sharon et d’Arafat, qui se connaissaient autant qu’ils se détestaient profondément, qu’une nouvelle page pourrait peut-être s’ouvrir et un processus de paix se mettre en marche. Ce ne fut pas le cas et les choses ont empiré. Ehud Olmert et Kadima n’ont pas changé d’un iota leur politique vis-à-vis de celle de Sharon et tout s’est passé comme s’il s’agissait de gagner du temps.

Du côté palestinien, Mahmud Abbas, qui était l’interlocuteur attendu et voulu par Israël n’a rien obtenu pendant de longs mois et l’arrivée au pouvoir de Hamas l’a isolé puis isolé l’ensemble du peuple palestinien sur la scène internationale. La crise libanaise, la guerre puis les images des morts innocents du Sud Liban ont marqué une nouvelle fracture entre les peuples et les gouvernants et non seulement dans le monde arabe mais également en Occident où le silence des gouvernements n’a pas été compris. Pendant ce temps, à Gaza, la terreur continuait de régner les bavures se sont multipliées avec la mort de familles, de femmes et d’enfants. Il n’y a plus de processus de paix, plus rien n’avance dans la région et les Palestiniens asphyxiés sont au bord de l’implosion.

Il est l’heure de faire une évaluation critique de la situation. Le problème israélo-palestinien ne sera jamais la seule affaire de deux peuples, de deux gouvernements. Nous sommes en face d’un conflit universel qui dans les perceptions comme dans les faits réunit toutes les dimensions du « clash des civilisations ». Dans la psyché global, Israël représente tout à la fois l’Occident, la culture judéo-chrétienne, le progrès et la démocratie alors que les Palestiniens représentent l’Orient, la civilisation musulmane, la tradition et l’ordre autocratique et souvent corrompu. On peut faire semblant de ne pas prendre la mesure de ce conflit mais c’est bien de cela qu’il s’agit aujourd’hui et le fait qu’aucune solution ne soit visible à l’horizon est une annonce de futurs conflits et de guerres, non une promesse de paix.

Il faut cesser d’entretenir de faux espoirs : quels que soient les dirigeants israéliens (du Likoud, de la gauche ou des religieux) ou palestiniens, (Mahmud Abbas, le Fatah ou le Hamas), la paix sera impossible si on laisse ces deux entités face à face. Avec l’ancienne autant qu’avec la nouvelle génération. L’histoire est trop chargée et les forces tout à fait inégales. On aimerait espérer que les Etats-Unis prennent urgemment conscience de leur rôle et comprennent enfin que leur soutien unilatéral, quasi aveugle, aux gouvernements successifs israéliens est une folie suicidaire qui, à terme, desservira clairement les intérêts de tous et notamment d’Israël dans la région. Le gouvernement américain s’est trompé en Iraq et continue à se méprendre profondément au cœur du conflit israélo-palestinien. Les présents conseillers et acteurs de l’administration Bush sont aveuglés par leur alliance avec Israël, et sauf à un changement total de cap, ils continueront à perdre tout crédit aux yeux des populations musulmanes. La grande puissance américaine ne pourra plus intervenir que par la force si elle continue à brûler toutes les cartes de sa diplomatie.

C’est peut-être du côté de l’Europe qu’il faut espérer un réalignement dans le conflit. La prise de conscience de la déroute en Iraq, la réaction des populations européennes aux massacres au Liban et enfin la détérioration de la situation à l’intérieur des territoires occupés va nécessairement avoir des conséquences sur les politiques des Etats européens. Sera-t-il possible à ces derniers de proposer autre chose, voire de forcer le gouvernement américain à revoir sa copie au Moyen-Orient ? C’est ce que personne ne peut déterminer pour l’heure mais il est clair que le rapport Baker parlant de l’Iran et de la Syrie comme élément de la solution est un potentiel repositionnement américain qui a été entendu et compris en Europe. Il est urgent que les pays européens interviennent dans le débat et proposent autre chose qu’un soutien mou aux « modérés » de la région qui n’ont aucune carte en main et qui ne pourront de toute façon rien faire sans leur engagement déterminé.

Il n’y aura pas de solutions au Moyen-Orient sans engagement plus conséquent de la communauté internationale et particulièrement de l’Europe. Ni les nouveaux leaders directement impliqués, ni les Etats arabes ne pourront faire avancer le processus de paix. Revenir aux accords internationaux et les faire respecter, libérer les territoires occupés de toute présence israélienne et faire cesser la construction du mur jugée illégale par les instances internationales avec l’impérative contrepartie de la cessation, du côté palestinien, des attentats et les attaques contre les villes et les civils, voilà le cadre auquel il faut revenir au plus vite. Il appartient à la communauté internationale de comprendre qu’elle est un acteur incontournable que ses représentants doivent prendre langue avec toutes les parties avec une vision claire et équilibrée. Elle parviendra à ses fins si, et seulement si, elle propose une démarche équilibrée et raisonnable. Dans le cas contraire ses interventions comme ses silences sont contreproductifs. Tous les mouvements de résistance - quels qu’ils soient du Fatah, du Hezbollah, du Hamas voire des produits de la rhétorique d’al-Qaïda - gagneront en force et en légitimité sur le terrain dans le vide laissé par les instances internationales et le silence apparenté à une carte blanche offerte à la superpuissance régionale qu’est en fait Israël.

Que l’on parle de soutien financier, de commerce d’armes, de la possession de l’arme nucléaire et des exigences de paix, tout se passe comme si Israël obtenait des passe-droits que les Etats arabes, perses ou palestiniens n’acquerront jamais. Les Palestiniens ne sont point dupes et ils n’écouteront pas les voix qui voudraient leur faire croire que la solution devra se trouver au gré de discussions directes avec l’ennemi du jour. Ils savent ce qui se passe derrière la scène et si les Européens et les Américains continuent à tromper et à se tromper de derrière ladite scène, il y a fort à parier qu’il n’y aura pas de paix au Proche-Orient, autrement dit pas de paix dans le monde. Ces cinq dernières années nous ont appris que, bon gré mal gré, tout est connecté : notre silence complice face à la souffrance au Moyen-Orient nous apportera par voie de conséquence directe l’insécurité dans notre quotidien. Notre silence est l’allié objectif de leur violence autant que leurs morts accompagnent nos nouvelles peurs quant à notre sécurité. Dans l’aventure chacun de nous y perd quelque chose : au pire la vie, au minimum la liberté

Source : Tariq Ramadan
http://www.tariqramadan.com/article.php3?id_article=909






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3-3 Point de vue de Zvi Bar'el : Quand Tzipi Livni cisèle ses formules.
La ministre des affaires étrangères Tzipi Livni a de jolies formules pourparler d'un "axe modéré". Pratique pour éviter de répondre à une question essentielle : Israël est-il prêt, oui ou non, à se retirer des territoiresoccupés?]
Devant l'Union des Autorités locales, la ministre des affaires étrangères
Tzipi Livni a innové : "Aujourd'hui, je peux placer des parties qui
partagent un dénominateur commun dans le même camp, y compris certains Etats
arabes. La menace iranienne est une question qui inquiète également les
Etats modérés voisins de l'Iran." Il est donc temps de nouer des alliances
avec les Etats arabes modérés et aussi de parler avec les Palestiniens
modérés, y compris dans une situation de terrorisme. Car, pense Livni, "dans
la situation d'aujourd'hui, la division entre Arabes et Juifs, entre gauche
et droite, est devenue obsolète. Le [véritable] clivage est entre les
extrémistes et les modérés, à tous les niveaux."

Il s'agit effectivement d'une distinction séduisante, et qui évite le coeur
de la lutte entre nations. Comme s'il n'y avait en réalité qu'un seul
affrontement global, contre l'islam extrémiste symbolisé par l'Iran, et que
cet affrontement traversait les frontières, évacuait les aspirations
nationales des Palestiniens et ôtait même tout sens aux différences entre
droite et gauche. L'Occident contre l'Orient, et rien d'autre. Formulation
très confortable pour un membre d'un gouvernement qui n'a pas raté une
occasion d'affaiblir ces mêmes modérés et de les pousser au désespoir.

Mais, alors que Tzipi Livni cisèle ses formules, comme quelqu'un qui se
considère digne de postuler au poste de premier ministre, quelqu'un d'autre
dirige l'Etat d'Israël. Le jour même où elle faisait ses remarques, son
patron Ehoud Olmert rencontrait Hosni Moubarak pour parler de quelques
dizaines de millions de dollars de plus pour Mahmoud Abbas, de la libération
de quelques centaines de prisonniers, et, peut-être, peut-être seulement,
d'une rencontre quadripartite entre la Jordanie, l'Egypte, Israël et Abbas.
Cette discussion entre Olmert et Moubarak n'avait donc rien d'une nouvelle
initiative diplomatique ni d'une vision. Il s'agissait tout simplement de
troc.

Il ne manquait pas grand-chose pour dire que l'importance de cette rencontre
avec Moubarak résidai dans le fait même qu'elle ait eu lieu, comme si
Moubarak était un ennemi plutôt qu'un allié qui attend depuis des années
qu'Israël lui donne enfin quelque chose afin qu'il puisse faire avancer les
processus régionaux. Olmert avait-il vraiment besoin de se rendre auprès de
Moubarak pour parler de 100 millions de $ qui, de toute façon, appartiennent
aux Palestiniens, ou de la nécessité pour les Egyptiens de renforcer leur
surveillance de l'axe Philadelphie (frontière entre l'Egypte et la bande de
Gaza)?

Mais quand d'importants dirigeants comme Moubarak et le roi Abdallah de
Jordanie ("modérés" selon la terminologie de Livni, ayant osé signer un
traité de paix avec Israël) sont traités comme des apparatchiks, dont la
seule fonction est d'attendre au téléphone, ou quand une rencontre avec eux
est considérée comme un "geste", alors qu'une rencontre avec le président
Bush est qualifiée de "sommet", le terme d'"axe modéré" perd de son sens.

De toute façon, quand dans la perspective de la guerre entre les Enfants de
la Lumière contre les Enfants des Ténèbres, on ne remarque pas les colonies
illégales ou la reprise de la construction dans le marché de Hebron, la
nouvelle thèse orientaliste de Livni s'effondre sur cette division entre
"extrémistes et modérés à tous les niveaux". De plus, cet "axe modéré" a une
espérance de vie limitée.

Moubarak est en train de préparer l'Egypte à son héritier. Le roi Abdallah
d'Arabie saoudite n'est plus une jeunesse. La Jordanie est bien un ami
proche, mais elle n'a pas l'influence de ses deux voisins. Les dirigeants
syriens sont de toute façon désignés comme des soutiens au terrorisme, même
si Assad cherche à reprendre les négociations. Abbas est occupé à mettre fin
à la guerre des gangs chez lui, et au lieu d'un plan diplomatique, tout ce
qu'il reçoit, c'est un baiser sur la joue de la part d'Olmert et une
livraison de fusils. Et le jour de la rencontre à Sharm el-Sheikh, lui et
Moubarak recevaient un petit coup à l'israélienne : l'opération mortelle
d'un commando à Ramallah (opération qualifiée plus tard "d'erreur" par
l'armée israélienne, ndt).

La Ligue arabe, qui en 2002 avait accepté d'accorder à Israël une ceinture
de sécurité et une promesse de normalisation en échange d'un retrait et
d'une solution au problème palestinien, pense que personne en Israël ne l'a
prise au sérieux. Et, après 40 ans d'occupation, les Etats arabes veulent
savoir : Israël a-t-il oui ou non l'intention de se retirer des territoires,
de démanteler les colonies, de descendre du Golan et de redessiner ses
frontières? Si la réponse est non, et si Israël ne souhaite parler que de la
libération de quelques centaines de prisonniers et de quelques millions de
dollars, il devra mener ses affaires face aux organisations terroristes.

Zvi Bar'el
Ha'aretz, 7 janvier 2007
Trad. : Gérard pour La Paix Maintenant
http://www.haaretz.com/hasen/spages/810115.html




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4 Courrier des lecteurs & trouvé sur le net

Ndlr : PS : La publication des articles ou analyse ne signifie nullement que la rédaction partage les analyses ou point de vue des auteurs, mais doit être vu comme information

4-1 La Paix Maintenant : Réaction aux dire de Khaled Mesh'al.

NB : Une heure après la publication de l'interview de Khaled Mesh'al à Reuters(1), le porte-parole du gouvernement du Hamas, Ghazi Hamad, a déclaré à Ha'aretz que si Mesh'al a bien dit "Israël existe, c'est un fait", il n'avait absolument pas parlé d'une reconnaissance d'Israël. "Il n'y a aucun changement dans notre position, et le Hamas ne reconnaît pas Israël."
Salah Bardawil, chef du groupe parlementaire du Hamas, a déclaré à Ha'aretz qu'après avoir vérifié auprès de Mesh'al, il semble que ses propos auraient été déformés : "Il n'a pas parlé de reconnaissance, mais seulement d'un cessez-le-feu avec Israël."

Le Hamas reconnaît l'existence d'Israël comme un fait accompli, a déclaré mercredi à l'agence Reuters le dirigeant politique du groupe, basé à Damas. Israël est une "réalité", et "il demeurera un Etat appelé Israël, c'est un fait", a déclaré dans une interview Khaled Mesh'al, considéré comme le principal détenteur du pouvoir au sein du Hamas.
Le problème n'est pas l'existence de l'Etat d'Israël, mais la non création d'un Etat palestinien, a dit Mesh'al, dont le parti est à la tête du gouvernement palestinien. Mais une reconnaissance officielle d'Israël ne pourrait être envisagée qu'une fois créé un Etat palestinien, a-t-il ajouté.
Certains représentants du Hamas avaient déjà fait des déclarations analogues l'année dernière, disant que l'existence d'Israël était un fait indéniable, mais c'est la première fois que de telles déclarations proviennent de la direction du groupe en Syrie.

C'est également la première fois qu'un représentant du Hamas évoque la possibilité d'une reconnaissance pleine et entière d'Israël pour l'avenir. Jusqu'ici, la position officielle du Hamas, répétée de nombreuses fois par Mesh'al, était que le Hamas ne reconnaîtrait jamais Israël.
Israël et les gouvernements occidentaux ont appliqué des sanctions économiques sur le gouvernement palestinien dirigé par le Hamas pour avoir refusé de reconnaître Israël, de renoncer à la violence et d'accepter les accords passés. L'Egypte a elle aussi fait pression sur le Hamas pour qu'il reconnaisse Israël.
Mesh'al a dit que le Hamas refuserait de se soumettre aux conditions occidentales et refuserait d'envisager une reconnaissance officielle de l'Etat juif tant que son exigence d'un Etat palestinien ne serait pas acceptée.
Le Hamas veut un Etat palestinien qui comprenne Gaza, la Cisjordanie et Jérusalem Est, ainsi que le droit des réfugiés palestiniens de retourner dans leurs foyers, perdus depuis la guerre de 1967 et avant cela, a dit Mesh'al.
"En tant que Palestinien, je parle aujourd'hui d'une exigence palestinienne et arabe d'un Etat dans les frontières de 1967. Il est vrai que, dans la réalité, il y aura une entité nommée Israël sur le reste de la terre palestinienne", a dit Mesh'al. "Cela est une réalité, mais je ne m'occuperai ni de reconnaissance, ni d'admission", a-t-il ajouté.
http://www.haaretz.com/hasen/spages/811997.html

(1) http://www.lapaixmaintenant.org/article1489
Sources La Paix Maintenant

Mercredi 10 Janvier 2007

Trad. : Gérard pour La Paix Maintenant



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4-2 Benjamin Barthe : Les deux Palestine : l'unité en lambeaux.

Extrait

Dans l'appellation officielle "Territoires occupés palestiniens", le pluriel est, plus que jamais, de rigueur. Au découpage géographique entre la Cisjordanie et la bande de Gaza se superposent désormais plusieurs sous-divisions, modelées en Cisjordanie par la "barrière de séparation" israélienne, les colonies et les barrages militaires.
DEUX ENTITÉS
La Cisjordanie et Gaza, comme entités particulières, sont nées de la défaite des Palestiniens et des armées arabes face à l'Etat juif créé en 1948. Dite "Ligne verte", la frontière de l'armistice, délimitée un an plus tard, laisse aux Palestiniens 22 % de leur patrie historique, en deux morceaux.

La bande de Gaza est alors administrée par l'Egypte et la Cisjordanie annexée par la Jordanie, puis toutes deux sont occupées, à partir de 1967, par Israël. Elles devaient être rétrocédées par étapes à l'Autorité palestinienne, selon la logique établie par les accords de "reconnaissance mutuelle" signés en 1993 à Oslo entre Israël et l'OLP. Ce processus chaotique, entravé par la poursuite de la colonisation israélienne et des attentats-suicides palestiniens, a été interrompu en 2000 par l'échec du sommet de paix de Camp David, auquel a succédé la deuxième Intifada. A cette date, l'Autorité contrôlait, seule ou en partage avec Israël, des confettis éparpillés sur 40 % de la Cisjordanie et 70 % d'une bande de Gaza clôturée depuis le début des années 1990.

Très vite, les liens qui unissaient les deux territoires sont coupés par l'armée israélienne. Aujourd'hui, hormis quelques rares hommes d'affaires ou personnalités du Fatah, aucun Palestinien ne circule plus entre Gaza et la Cisjordanie.

Les accords d'Oslo stipulaient qu'ils forment une seule entité, mais le "passage protégé" promis et réaffirmé par un accord en 2005 n'a jamais vu le jour.

Sources Le Monde



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Karim Lebhour :, Les check-points "servent à nous humilier"
Les habitants de Cisjordanie affichent leur scepticisme face à l’annonce israélienne d’un allégement des barrages en Cisjordanie
Les quatre blocs de béton qui barrent la route du village de Ras Karkar sont toujours là. Dix jours après l’annonce, le 25 décembre, par le premier ministre israélien Ehoud Olmert de la levée prochaine de certains barrages israéliens en Cisjordanie, la mesure tarde à se concrétiser.

Ras Karkar, à une quinzaine de kilomètres à l’ouest de Ramallah, pourrait être parmi les premiers bénéficiaires de cet allégement annoncé. La route principale, qui dessert également la colonie de Dolev, a été fermée en 2002 après une vague d’attentats suicides en Israël.

Depuis, les Palestiniens doivent emprunter une route de contournement, étroite et dangereuse, au fond d’une vallée encaissée qui n’était auparavant qu’un chemin de pâture pour le bétail. Cela allonge le trajet d’une dizaine de kilomètres.

« Regardez cette route ! On ne peut même pas se croiser à deux voitures. Il faut que l’un se range sur le côté pour laisser passer l’autre. Tous les mois, on doit changer un pneu à cause de l’état de la route qui abîme le caoutchouc », tempête un chauffeur du taxi qui balaye d’un haussement d’épaule les promesses israéliennes de faciliter les déplacements des Palestiniens en Cisjordanie. « Les annonces d’Olmert, c’est pour la presse. On n’a aucune confiance.

Depuis toujours, on entend dire que l’armée va lever des barrages. Ça n’arrive jamais. »



"Sur le terrain, on ne voit rien"

Devant la gare routière de Ramallah, d’où partent les taxis collectifs pour le nord de la Cisjordanie, les chauffeurs qui attendent les passagers pour Naplouse, Jénine ou Qalqilya, affichent le même scepticisme. « On n’a rien vu. Je fume toujours un paquet de cigarettes par jour en attendant aux check-points », ironise un chauffeur.

Tous passent plusieurs heures par jour aux différents points de contrôle qui coupent la Cisjordanie en plusieurs tronçons. « Il n’y a eu aucune amélioration, lance un autre. Les Israéliens parlent mais, sur le terrain, on ne voit rien. Vendredi 29 décembre, veille de l’Aïd, ils ont fermé le check-point d’Atara (NDLR : point de contrôle au nord de Ramallah). On a mis plus de quatre heures pour arriver à Qalqilya. »

Depuis la seconde Intifada, Israël a considérablement restreint la liberté de circulation des Palestiniens en Cisjordanie. Entre Ramallah et Naplouse, le trajet d’une quarantaine de kilomètres peut prendre entre 45 minutes et plus de trois heures, selon la sévérité des contrôles aux trois check-points qu’il faut traverser.

Lors d’une enquête, le bureau des Nations unies chargé de la coordination des affaires humanitaires (Ocha) a recensé pas moins de 534 « obstacles », check-points, blocs de béton ou simples amas de terre, qui entravent les déplacements des Palestiniens en Cisjordanie, sur un territoire de la taille d’un demi-département français. L’armée israélienne explique que ces barrages sont nécessaires pour empêcher la circulation des armes et des activistes palestiniens recherchés.



"Depuis deux ou trois ans tout est bloqué"

« Depuis deux ou trois ans tout est bloqué. Beaucoup de chemins ont été fermés », témoigne Abou Daoud par la fenêtre de sa longue Mercedes huit places. Parfois, nous sommes forcés de passer à travers champ, mais gare à toi si les soldats te voient. Ils peuvent te frapper ou casser la voiture. Des fois, ils confisquent les clés, c’est pour ça que tous les chauffeurs en ont au moins quatre », dit-il dans un éclat de rire, en agitant plusieurs trousseaux de rechange.

De son côté, l’armée israélienne affirme n’avoir reçu aucune consigne pour commencer à lever des barrages. « C’est encore au niveau politique, entre le bureau du premier ministre et celui du ministre de la défense », affirme une porte-parole du bureau de presse de l’armée israélienne. En fait, les généraux traînent les pieds pour appliquer ce plan de démantèlement, qu’ils jugent préjudiciable à la sécurité d’Israël et des colons qui vivent en Cisjordanie.

Selon les informations du quotidien israélien Haaretz, les premiers assouplissements pourraient commencer à prendre effet cette semaine. Si les mesures annoncées sont effectivement appliquées, 27 barrages routiers qui ne sont pas occupés par des soldats seront démantelés. Les contrôles seront également allégés sur une quinzaine de check-points.



Les check-points "servent à nous humilier"

Une goutte d’eau, juge Khaled, 30 ans, qui travaille à Ramallah et ne rentre chez lui à Naplouse qu’une fois par semaine pour éviter le tracas de check-points. « Souvent les soldats nous font descendre de voiture et nous demandent de nous déshabiller. Les check-points ne sont pas là pour arrêter les personnes recherchées. Ils servent à nous humilier, à faire sentir que les Israéliens sont là. C’est une forme de pression psychologique. Si certains barrages sont enlevés, à la moindre alerte, ils seront vite remis en place. »

Preuve supplémentaire pour les Palestiniens de l’ambiguïté de la politique israélienne, le jour de l’annonce de la levée de certains barrages, Ehoud Olmert a également officialisé la construction d’une nouvelle colonie juive dans la vallée du Jourdain, Maskiot, pour accueillir les colons évacués de Gaza en 2005.

C’est la première fois depuis dix ans qu’une colonie va être construite en Cisjordanie avec l’aval du gouvernement israélien. « Quel message cherchent-ils à envoyer ? », s’est interrogé Saeb Erekat, conseiller du président palestinien Mahmoud Abbas, jugeant que cette construction violait le nouvel esprit de coopération affiché par le premier ministre israélien.

Karim LEBHOUR,

Ramallah
La Croix du 04 janvier 2007

http://www.aloufok.net/article.php3?id_article=3605



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4-4 Point de vue de Dr Christian Phaneuf : Israël et le traité de non-prolifération ? l 'Onu fait montre d'hypocrisie.!

Extrait : partie Israel

La dernière résolution du Conseil de sécurité de l'ONU contre l'Iran, un pays signataire du traité de non-prolifération, constitue selon moi un véritable outrage à l'équité et à la justice internationale. Je m'étonne du peu d'émoi, et aussi de l'information trop souvent incomplète rapportée par les médias canadiens, sur les grands enjeux internationaux comme celui-ci.

Trop peu de journalisme d'enquête contestataire... À lire les revues canadiennes, nous avons l'impression que celles-ci ne vont que très timidement au-delà de la ligne officielle de la politique internationale canadiennne, elle-même passablement à la remorque de celle des É.-U.



Au moment même où le Conseil de sécurité de l'ONU vante les bienfaits de la non-prolifération et fignole sa résolution inefficace contre l'Iran, George W. Bush, cet apôtre de la paix, prenait son bâton de pèlerin et ratifiait un traité de coopération accrue dans le domaine du nucléaire avec l'Inde, un pays qui n'a pas signé l'accord de non-prolifération...

De son côté, l'État d'Israël, un ennemi juré de l'Iran, et un pays qui n'a pas non plus ratifié le traité de non-prolifération nucléaire, continue de fabriquer bien tranquillement, et ce depuis 1976, des centaines de bombes atomiques.

Les armes de destruction massive de l'État sioniste ont été mises au point et expérimentées, faut-il le rappeler, dans le plus grand secret, avec la complicité de l'Afrique du Sud, un État pratiquant alors lui aussi une politique agressive d'apartheid. Qui se ressemble, s'assemble...

Bien que soupçonnée depuis longtemps, la fabrication en série, par l'État d'Israël, de bombes atomiques n'a été confirmée au grand public que 10 ans plus tard, dans un article publié en 1986 par le London Sunday Times, à partir des renseignements et des photographies incriminantes fournies par Mordechai Vanunnu, un technicien nucléaire israélien travaillant à l'usine de production d'armes atomiques de Dimona.



Dysfonctionnement

Avec le dossier du nucléaire iranien, l'ONU démontre, une fois de plus qu'elle ne fonctionne pas. La raison de ce dysfonctionnement, c'est son dérapage progressif par rapport au mandat initial qui lui a été confié, à savoir éliminer la guerre en tant que mode de solution des conflits internationaux. Dans les faits, l'ONU n'est que l'ombre d'elle-même, un simple forum international dépourvu de tout pouvoir crédible d'intervention et bien neutralisé par un petit groupe de grandes puissances qui préfèrent se faire justice elles-même sur la scène internationale, et substituer à l'ONU son propre outil d'intervention militaire, l'OTAN.



Dr Christian Phaneuf

Québec

Le mardi 09 janvier 2007

http://www.cyberpresse.ca/article/20070109/CPSOLEIL/70109029/5287/CPOPINIONS



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4-5 Shraga Blum : Tsahal manque cruellement de crédits pour les défis à venir...

Ndlr : PS : La publication des articles ou analyse ne signifie nullement que la rédaction partage les analyses ou point de vue des auteurs, mais doit être vu comme information

L’argent étant le nerf de la guerre, le budget de la défense a toujours constitué un élément crucial dans la préparation de Tsahal face aux différents défis auquel l’Etat d’Israël était confronté. Tous le ministres de la défense sans exception se sont toujours farouchement battus pour augmenter le budget de leur ministère ou du moins pour éviter des réductions de crédits exigées par leur collègue des Finances. Ce qui était vrai dans le passé l’est encore davantage aujourd’hui. Le gouvernement se trouve dans une situation kafkaïenne de devoir à la fois réduire drastiquement le budget national suite notamment aux dépenses dues à la guerre du Liban et à la reconstruction du Nord, et à la fois répondre aux demandes justifiées de différents secteurs, tous aussi « essentiels » les uns que les autres, comme celui de la défense, de l’éducation, de la santé ou des couches défavorisées de la population.

Les menaces qui se dessinent au début de cette année 2007 ne sont pas pour réduire l’inquiétude des milieux militaires. Un spécialiste stratégique a résumé cette question en disant : « Nous avons agi de la meilleure des manières par le passé, mais je suis très inquiet pour les années qui viennent »

Malgré la décision d’augmenter de manière substantielle les crédits alloués à la défense, qui atteindront les 35 milliards de chekalim, les experts stratégiques estiment que les menaces qui se précisent, et notamment celle venant de l’Iran, nécessitent des crédits qui vont bien au-delà de ces sommes déjà astronomiques. Déjà, le plan budgétaire pluriannuel a été mis de côté pour concentrer la majorité des crédits sur l’année qui commence.

D’après les conclusions de nombreux experts, les risques de confrontation avec la Syrie, le Hezbollah et l’Iran, en 2007 sont élevés, sans parler du Hamas et des organisations de résistance palestiniennes, ou encore des menaces du Jihad international. Tout le monde est d’accord pour dire que la stabilité régionale est grandement menacée, que le risque d’embrasement n’est qu’une question de temps, et de savoir par où cela va commencer !

Pour pallier aux défaillances de la dernière guerre du Liban, il faut améliorer de manière conséquente la formation et l’équipement des réservistes, et remettre les arsenaux militaires à flots. Et pour préparer Tsahal sur le plan technologique et tactique, il faut développer la recherche. Tous ces objectifs sont très onéreux, et il s’avère, d’après les expertises, qu’il manquerait huit milliards de chekalim au budget de la défense pour pouvoir faire face aux impératifs du moment, soit plus du quart du budget actuel.

Autre donnée inquiétante, aucune recherche n’aurait été encore entamée sur une parade efficace aux roquettes Kassam, en dépit des instructions du Ministre de la Défense. Enfin, il apparaîtrait que près de la moitié de ce budget gargantuesque de la défense est affecté…au paiement des salaires et des retraites !

L’Etat major de Tsahal se montre également inquiet face à l’impossibilité d’augmenter les effectifs militaires dans les années à venir.

Shraga Blum
mercredi 10 janvier 2007 - 17:08
http://a7fr.com/Default.aspx?tabid=52&articleType=ArticleView&articleId=29116



Autant de négociations ardues et de « cheveux blancs » en perspective pour nos dirigeants politiques et militaires, mais surtout à régler au plus vite, car en face de nous, le compte à rebours est en marche



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5 Annexes

Ndlr : PS : La publication des articles ou analyse ne signifie nullement que la rédaction partage les analyses ou point de vue des auteurs, mais doit être vu comme information



5-1 Point de vue de René Naba’a : De l’accusation d’antisémitisme comme arme de dissuasion.

Gilad Shalit, Arno Klarsfeld.....De la confusion des genres

Le mutisme est complet sur ce point, refoulé au tréfonds du subconscient national, un point noir de la conscience, telle une consigne implicite, comme la marque d’une connivence entre la classe politique française et la communauté journalistique.

Le sujet fâche, car il fait tâche. Au risque de s’exposer à l’accusation d’antisémitisme, il importe toutefois d’assumer le risque de troubler la bonne conscience léthargique occidentale pour la placer face à ses responsabilités, tant il est vrai que la solidarité avec Israël, pour légitime qu’elle puisse être pour de larges secteurs de l’opinion occidentale, ne saurait occulter le débat de fond que cette question pose tant au niveau du droit que de la morale.

Cette question revêt d’autant plus d’actualité que la chorale de l’armée israélienne a organisé, fin décembre 2006, en France, une tournée de collecte de solidarité en compagnie de la famille du caporal Shalit, sans la moindre objection des pouvoirs publics ou de la presse, sans la moindre attention pour les dix mille prisonniers palestiniens et arabes détenus, parfois sans jugement, par les autorités d’occupation israéliennes.

Un citoyen français engagé volontaire dans une armée étrangère en opération de guerre contre un peuple ami, sans mandat explicite du gouvernement français, peut-il se prévaloir de la nationalité française ?

Autrement dit, Gilad Shalit, le caporal de l’armée israélienne capturé le 25 juin 2006 par les Palestiniens, peut-il se prévaloir de la nationalité française et réclamer ès-qualité l’intervention diplomatique du gouvernement français. Son engagement dans l’armée israélienne, sans mandat gouvernemental français, entraîne-t-il, sinon la déchéance de sa nationalité, à tout le moins la caducité de son droit à invoquer la protection de la nationalité française ?

Mutatis Mutandis, un Français de confession musulmane qui choisit d’effectuer son service militaire au Soudan en guerre contre le Tchad, ou un arabe chrétien de nationalité française qui sert dans les rangs de l’armée ivoirienne, continueraient-ils de bénéficier, eux, de la protection de la nationalité française dans l’hypothèse de leur capture où pèserait sur eux immanquablement la suspicion ?

Le cas de Gilad Shalit ne constitue pas un cas isolé. Ainsi un bi-national franco-allemand qui choisit de servir le drapeau d’un pays tiers par affinité religieuse, en exerçant non une option de nationalité mais une requête en naturalisation, a-t-il vocation à assumer des fonctions de conseiller ministériel dans son pays d’origine ?

Son statut de réserviste d’une armée en guerre contre un pays ami de la France, à tout moment réquisitionnable, lui confère-t-il la quiétude suffisante dans la gestion d’un sujet aussi épineux que celui des "sans papiers". Cette situation juridiquement sinon exorbitante du moins insolite, ne le place-t-elle pas en porte-à-faux dans sa fonction, en cas de mobilisation de son armée d’affectation ?

La nomination de Arno Klarsfeld, juriste français et réserviste de l’armée israélienne, au poste de conseiller du ministre de l’Intérieur Nicolas Sarkozy sanctionne-t-elle la carence française dans le domaine des compétences ou relève-t-elle d’une manoeuvre électoraliste ?

La question peut paraître dérisoire au regard des enjeux de puissance que sous tend cette nouvelle guerre du Liban, des morts et destructions de l’été 2006 qui se sont ensuivis tant au Liban qu’en Palestine qu’en Israël même.

Sauf à considérer Israël comme le fer de lance du combat occidental contre l’ensemble arabo-musulman et que son service dans l’armée israélienne constitue une forme déguisée de coopération stratégique militaire franco-israélienne, le cas du caporal Shalit se doit d’être soumis pour avis aux autorités juridictionnelles compétentes et faire oeuvre de jurisprudence en ce domaine, car au delà de ce problème de droit se pose un problème de morale politique : La double allégeance justifie-t-elle la confusion juridique ? Exonère-t-elle de toute obligation de réserve ? Autorise-t-elle toute licence au point de constituer un "passe droit" ?

Le service militaire dans l’armée israélienne constitue-t-il désormais un passage obligé à des promotions politico-administratives en France ? Préfigure-t-il la collaboration future entre les diverses composantes de l’ « axe du bien », telle qu’elle est préconisée par les néo-conservateurs américains et leurs relais français ? Un axe constitué, selon ses promoteurs, par les Etats-Unis, Israël, au-delà, la droite française et le judaïsme institutionnel français, face à un « axe du mal » regroupant grosso modo le tiers monde arabo-musulman bariolé et dont le ralliement à sa cause de Philippe de Villers, représentant de la droite traditionnelle, le découvreur des mosquées souterraines de l’aéroport de Roissy, n’en est que la manifestation la plus pathétiquement symptomatique.

Les grandes civilisations se meurent des entorses répétitives qu’elles commettent à l’encontre de leurs propres principes.

A la faveur de la dégradation du climat international consécutive aux attentats anti-américains du 11 septembre 2001, de la guerre d’Afghanistan (2001-2002), de la guerre contre l’Irak (2003) et de la nouvelle guerre du Liban (2006), ainsi que de la transposition du conflit israélo-arabe en France, une bataille intellectuelle à coups de censure et d’accusation de racisme fait rage dans ce pays, qui constitue à la fois le plus important foyer musulman du monde occidental et le lieu d’implantation de la plus forte communauté juive d’Europe.

2) Une profusion d’experts occidentaux : Michel Houelbecq, Claude Imbert, Maurice Le Dantec, Alain Finkielkraut, Yves Charles Zarka, Yvan Rouffiol, Alexandre Adler, Georges Frèche, Pascal Sevran

Pas un jour ne passe sans qu’un ouvrage n’annonce des révélations sur les islamistes, objet certes de préoccupations des spécialistes mais dernier thème à la mode des marchands de sensation, pas un jour sans qu’un « islamologue », ces personnes qui se déclarent spécialistes de l’Islam, n’apparaisse sur les écrans de télévision pour donner sa propre explication du « phénomène du terrorisme islamiste » ou de l’arriération du monde arabe.

Cette littérature se nourrit d’ailleurs de l’actualité particulièrement abondante en ce domaine, dont les derniers en date sont l’attentat de Madrid, le 11 mars 2004 en représailles contre la participation de l’Espagne à la guerre contre l’Irak —et qui a conduit à la défaite électorale du premier ministre espagnol José Maria Aznar— ou encore les attentats de Londres en juillet 2005.

Les Arabes eux-mêmes ne se privent pas non plus de la nourrir par l’étalage de leur division, et beaucoup de commentateurs occidentaux ont puisé dans l’échec des derniers sommets arabes justification à leurs analyses ou à leurs préjugés anti-arabes, de même que la prise de distance opérée par les régimes sunnites arabes (Egypte, Arabie saoudite, Jordanie) contre la guérilla anti-israélienne du Hezbollah libanais.

Certes, les Arabes sont pour des raisons multiples responsables de la situation déplorable dans laquelle ils se trouvent. Il n’est, pour s’en convaincre, que de relire le remarquable « programme sur le développement humain » pour 2003 réalisé par un groupe d’experts arabes, qui y recense à l’origine du handicap arabe, plusieurs gros maux notamment l’analphabétisme, la pauvreté, l’autoritarisme des régimes politiques, l’absence de liberté, l’inégalité entre les sexes, l’intolérance à l’égard des minorités, etc.

Mais la profusion d’experts occidentaux est impressionnante, voire même préoccupante, au point de se demander si certains experts ne souhaitent mettre à profit ce regain d’intérêt pour la sphère arabo-musulmane pour y consacrer des stéréotypes dans l’imaginaire occidental.

Après le romancier français Michel Houelbecq, qui avait jugé « stupide » la religion musulmane, l’italienne Oriana Fallaci, qui avait dénoncé la saleté et l’arrièrisme des Arabes, et l’aveu d’un grand journaliste français Claude Imbert, directeur de l’hebdomadaire « Le Point », se déclarant « islamophobe » un ouvrage collectif, réalisé par une soixantaine d’universitaires français et arabes, consacré à « L’Islam en France », et édité par « Les Presses Universitaires de France » (PUF), apporte une touche intellectuelle et scientifique à cette nouvelle xénophobie anti-arabe.

Numéro hors série de la revue « Cités », la publication illustre sa couverture par une gravure reproduisant un musulman au nez crochu, tenant le Coran par la main et tournant le dos à la République. Curieux retournement des choses : l’ancien stéréotype d’identification des Juifs est désormais applicable aux Arabes et aux Musulmans. Curieux procédé qui consiste sous couvert de critique à pratiquer le dénigrement, sous couvert de lutte contre l’anti-sémitisme à favoriser un anti-arabisme.

Plus regrettable est que cette publication ait été cautionnée par un professeur de philosophie de la prestigieuse université parisienne « La Sorbonne », mais l’universitaire en question, Yves Charles Zarka, pense au contraire travailler à la mobilisation des esprits en France, qu’il considère comme le principal champ de bataille du conflit entre l’Occident et l’Islam. « Face à l’esprit de conquête, il faut développer l’esprit de résistance », écrit-il, en affirmant que la France est menacée par « la constitution d’une minorité tyrannique » qu’il importe de combattre.

Il ressort de la lecture de cet ouvrage le fait que l’image de l’Arabe se réduit à quelques images fortes, (délinquance, fanatisme, antisémitisme). Sous l’apparence scientifique, l’analyse est simpliste, sans que ces intellectuels n’aient jugé bon de se pencher sur les véritables raisons de la violence anti-occidentale du monde arabo-musulman, ou de la xénophobie anti-arabe ou musulmane des occidentaux.

Une lepénisation des esprits et du langage prend corps en France avec la banalisation du racisme ordinaire au quotidien cautionné par de grandes figures de l’intelligentzia ou de la classe politico-médiatique.

L’auteur fera grâce aux lecteurs des embardées répétitives et de leur impunité corrélative d’Alain Finkielkraut (l’équipe de France de foot black, black, black, risée de l’Europe), du parlementaire socialiste Georges Frêche sur le statut de « sous hommes » qu’il assigne aux Harkis, ces anciens supplétifs musulmans algériens de l’armée française, ou encore l’eugénisme préconisé par une vedette de la télévision publique, Pascal Sevran, en vue de réduire les capacités génésiques des Africains et de stériliser leur reproduction, dans la pire tradition hitlérienne, de même que celles les deux éditorialistes vedettes du "Figaro" le journal du grand capital, Yvan Rioufol sur le "nazi-islamisme" et d’Alexandre Adler sur le "fascisme vert" et de l’universitaire Robert Redeker.

La neutralité, l’objectivité et l’impartialité, qui caractérisaient jadis le travail universitaire, ne sont plus de mise face à la violence de la bataille, dont la polémique sur le port du foulard islamique et le tollé suscité par les biens pensants de l’équipe de l’hebdomadaire satirique Charlie hebdo, autour de Philippe Val, à propos des caricatures de Mahomet, l’hiver 2006. n’en sont que les derniers avatars.

Neufs intellectuels spécialistes de l’Islam, parmi lesquels Olivier Roy, grand connaisseur de l’Afghanistan, et Jocelyne Cesari, spécialiste de l’Islam européen, qui avaient pourtant contribué à ce numéro hors-série des PUF, ont admis dans un communiqué commun avoir été « piégé » par cet ouvrage de « propagande ». Le mensuel « le Monde diplomatique », dans sa livraison du mois d’Avril 2004, a dénoncé ce procédé considérant qu’il s’agit d’un nouvel habillage du racisme.

A noter qu’aucun de ces ouvrages, ni celui de Houellbecq, ni celui de Fallaci, pas plus que la revue « Cités », n’a fait l’objet d’une censure ou ses auteurs poursuivis en justice pour incitation à la haine raciale. Il n’en est pas de même pour les écrivains de l’autre bord.

L’exaspération du débat est telle que par un effet de transposition, toute critique vive de la politique israélienne, qu’elle émane d’arabes, de musulmans ou même d’intellectuels ou de personnalités de tradition culturelle ou religieuse juive, est assimilée à de l’antisémitisme.

Ainsi quand l’écrivain Renaud Camus, auteur d’un livre sur « la campagne de France », relève que les principaux chroniqueurs de France-culture, la radio de l’élite culturelle française, radio d’état tout de même, sont de confession juive, un tollé accueille ses propos, relayé par le Journal « Le Monde », qui l’accuse de favoriser l’antisémitisme ». Renaud mentionne ce fait dans quelques pages, d’une manière incidente, dans un volumineux ouvrage de 700 pages. Mais cela a suffi pour que soit déclenchée une campagne contre lui. Mais quand un auteur de roman policier, Maurice Le Dantec, se lie avec un groupe d’extrême droite française, et justifie la violence anti-arabe et anti-musulmane, son éditeur, la prestigieuse maison d’édition Gallimard, se contente de déplorer ses propos sans pour autant rompre sa collaboration avec lui.

Cédant à l’esprit du temps, Jean Jacques Aillagon, l’ancien ministre de la culture, sur simple coup de fil de son ami l’écrivain Bernard Henry Lévy, a ainsi déprogrammé un film réalisé par un israélien, Eyal Sivan, et un palestinien, Michel Khleifi, intitulé « La route 181, fragments d’un voyage en Palestine-Israël » au motif qu’il présente une vision « unilatérale » du problème israélo-palestinien. L’ancien ministre a ordonné la censure sans même se donner la peine de visionner le film au préalable, sans même se rendre compte que ces deux cinéastes professionnels, venant de deux bords opposés, en entrecroisant leur regard, apportaient une vision synthétique du problème.

La complaisance mondaine ne saurait tenir lieu de politique. Aillagon a été écarté du gouvernement Raffarin à la suite de la déroute électorale de la droite aux dernières élections régionales françaises, le 28 mars 2004, recasé à Venise par l’ami de Bernard Henry Lévy, l’homme d’affaires François Pinault. Mais le film documentaire continue de développer son audience. Toutefois le cinéaste israélien Eyal Sivan n’a pu s’épargner l’accusation d’« antisémitisme » que lui a infligée, en toute impunité, l’un des chefs de file de ce courant Alain Finkielkraut.

Bien pire, Le CRIF, le Conseil Représentatif des Institutions Juives de France, qui se doit, en tant qu’instance d’intermédiation auprès des pouvoirs publics, favoriser la cohésion nationale et le dialogue interreligieux, dénature son rôle en se plaçant à l’avant garde de la lutte anti-arabe.

Le président du CRIF, en personne, M. Roger Cukiermann, s’est ainsi félicité publiquement, sans être désavoué, du succès du chef de l’extrême droite française, Jean Marie Le Pen, aux élections présidentielles de 2002, en considérant qu’il s’agit d’une « bonne leçon aux Arabes ». Nulle personnalité de premier plan française, ni politique, ni religieuse, n’a émis une protestation à cette occasion.

De même, lorsque des organisations juives organisent des concerts de gala pour récolter de l’argent pour l’armée israélienne et « le bien être du soldat juif », nul, non plus, ne se hasarde à critiquer cette opération de promotion d’autant plus inopportune et provocante que son principal bénéficiaire apparaît, tout de même, au regard du Droit international, comme une « armée d’occupation » en Cisjordanie, à Gaza et en Syrie. Pas une critique lorsque la chorale de l’armée israélienne organise, fin décembre 2006, une tournée de gala en France en compagnie de la famille du caporal Shalit et des deux autres soldats israéliens capturés par le Hezbollah, occultant le sort des dix mille prisonniers libanais, palestiniens et arabes croupissant dans les géoles israéliennes sous un régime qualifié par l’ancien président américain Jimmy Carter de « régime d’apartheid ».

Pas une critique non plus quand Israël se livre à une destruction systématique du Liban, en violation flagrante du Droit Humanitaire International, en représailles à la capture de deux soldats israéliens au sud-Liban.

Indice complémentaire de la dégradation du sens civique national, pas une objection n’a été soulevée pour contester la qualité de "Français" au caporal Shalit, "le nouveau soldat Ryan" des temps modernes. Plus grave, nul dans la classe politique ou la presse ne s’est hasardé à soulever le problème de la dualité d’allégeance des bi-nationaux franco-israéliens dans l’exercice de responsabilités politiques ou militaires en France ou en Israël, particulièrement en temps de guerre.

Le Quai d’Orsay a donné à savoir à diverses reprises qu’il s’impliquait dans la libération du caporal Shalit, —non pas tant pour des raisons humanitaires ce qui peut paraître concevable, mais du fait de sa "nationalité française"—, omettant de préciser que ce citoyen se trouvait en opération de guerre dans une armée étrangère contre un peuple supposé ami de la France, le peuple palestinien.

Une mise au point du Quai d’Orsay sur la situation juridique des bi-nationaux franco-israéliens servant dans l’armée israélienne :

Le Quai d’Orsay a précisé à l’auteur de cet article que « Le statut juridique des soldats israéliens qui disposent également de la nationalité française est réglé par la Convention entre la France et Israël relative au service militaire des doubles nationaux du 30 juin 1959.

En vertu de ce traité, les doubles nationaux sont tenus d’accomplir leur service militaire actif dans celui des deux Etats où ils ont leur résidence permanente (art. 2, 1°)). Ils ont également la possibilité de prendre volontairement du service dans les forces armées de l’Etat de leur choix avant d’avoir été appelés par l’autre Etat (art. 3) ; la suppression du service militaire obligatoire en France ne semble pas avoir d’autre incidence à cet égard que de permettre aux personnes considérées de s’engager volontairement dans les forces armées de l’un des deux Etats. L’article 7 de la Convention permet par ailleurs l’appel sous les drapeaux des doubles nationaux en cas de mobilisation. Enfin, en ce qui concerne plus directement la nationalité des personnes visées par la convention, l’article 8 de celle-ci prévoit que "les dispositions de la présente convention n’affectent en rien la condition juridique des intéressés en matière de nationalité".

Dès lors, l’engagement dans l’armée israélienne du caporal Shalit ne saurait en aucun cas entraîner une "double allégeance" justifiant "la confusion juridique", pour reprendre les termes de votre message. La Convention du 30 juin 1959 a précisément pour objet de régler la situation militaire des doubles nationaux franco-israéliens, en préservant la "condition juridique des intéressés en matière de nationalité" (article 8) et, partant, l’ensemble des droits afférents à la possession de la nationalité française. Fin de citation du Quai d’Orsay))

Donnons acte au Quai d’Orsay en observant toutefois que cet accord, conclu en 1959, en pleine euphorie franco israélienne consécutive à l’agression tripartite de Suez (anglo-franco-israélienne-1956), a été signé à une époque où l’armée israélienne n’occupait pas de territoires arabes et ne constituait donc pas, au regard du droit international, une « armée d’occupation ».

Une haine imaginaire ?

De son côté, Le CRIF s’est opposé, dans le passé, à des opérations pédagogiques conjointes israélo-palestiniennes comme pour maintenir le clivage ambiant. Il s’est ainsi notamment opposé à la tenue d’une conférence de presse conjointe, dans un collège de Nice dans le sud de la France, entre Mme Leila Shahid, ancienne représentante de la Palestine en France, et de M.Michel Warshavski, écrivain israélien, opposant à la politique israélienne, au motif que l’école française ne devait être un lieu de débat en France.

Ce qui donne à penser que pour le Crif, particulièrement pour son représentant dans le sud de la France , le député Rudy Salles, auteur de la demande d’interdiction, seuls les inconditionnels de Sharon et de ses successeurs ont droit de parole en France.

Sans risquer de se contredire, le CRIF avait pourtant demandé et obtenu que les élèves français du sud de la France, de toutes les confessions, (chrétiens, juifs et musulmans), se rendent à Auchwitz, en Pologne, en un voyage de recueillement dans cet ancien camp de concentration des Juifs du régime nazi. Ce voyage, auquel les parents des élèves arabes avaient donné leur accord, devait avoir une fonction pédagogique visant à dénoncer les horreurs de la guerre et du racisme.

La pédagogie ne saurait être à sens unique. L’annulation de la conférence de Leila Shahid à Nice a entraîné symétriquement l’annulation du voyage d’Auschwitz par les parents des élèves arabes, qui estimaient qu’il ne saurait y avoir deux poids deux mesures dans la lutte anti-raciste.

C’est au CRIF, d’ailleurs, que Jean Pierre Raffarin, a conféré, le 18 mars 2004, trois jours avant les élections régionales, le droit d’être associé à la police de l’ Internet pour dépister les sites « anti-sémites ». Un droit qui constitue un privilège exorbitant, en contradiction avec le principe de légalité, un des principes fondateurs de la République française.

Le CRIF n’a pas attendu cette faculté pour faire la police à l’égard de toute opinion dissidente, y compris au sein des intellectuels de culture ou de religion juive. C’est ainsi que coup sur coup, le sociologue Edgar Morin, qui s’était désolidarisé de la politique du gouvernement d’Ariel Sharon, de même que le politologue américain Norman Finkielstein, qui avait rédigé un ouvrage sur « l’industrie de l’holocauste », qui constitue une « réflexion sur l’exploitation de la souffrance des juifs », ont été poursuivis en justice par l’association France-Israêl pour diffamation à l’égard d’Israël.

Bravant l’interdit, un avocat du barreau de Paris, Guillaume Weill-Raynal, frère jumeau du journaliste Clément Weill-Raynall, un des chefs de file du combat communautariste, s’est livré à une « contre-enquête sur le nouvel antisémitisme en France » pour déplorer cette « haine imaginaire » nourrie par le judaïsme institutionnel, les médias et des intellectuels de renom, à base de constructions intellectuelles relevant de « l’ordre fantasmatique », et qui plonge la communauté juive dans la peur, plutôt que de l’inciter à affronter les défis du contemporain ». (1)

Une indignation sélective

L’indignation est sélective : Georges Frêche, Alain Finkielkraut, Pascal Sevran continuent d’avoir droit de cité, mais l’humoriste franco-camerounais Dieudonné est voué aux gémonies pour avoir caricaturé l’extrémisme de l’ancien premier ministre israélien Ariel Sharon, en adaptant le salut nazi « Heil Hitler » en « IsraHeil ». Interdit d’accès de certaines salles de concert, notamment le célèbre « Olympia » de Paris, il a été, lui, poursuivi en justice « pour incitation à une haine à caractère racial ».

Robert Menard, responsable de l’organisation « Reporters sans Frontières », a déploré, lors du procès Dieudonné, le 2 avril 2004, « l’espèce de régression de la liberté d’expression » en France, dénonçant une « communautarisation de la pensée », phénomène, qui aboutit, selon lui, à faire que « si vous n’êtes pas juif, vous ne pouvez parler des juifs ».

« La dernière passion du Christ », le film de Mel Gibson relatant le crucifixion de Jésus Christ, en est la dernière manifestation. Les grands producteurs français en ont refusé sa commercialisation au motif qu’elle relançait la responsabilité des juifs dans la mort du Christ et favorisait un renouveau de l’antisémitisme.

Comme si les actes de quelques rabbins qui passent pour avoir ordonné, il y a deux mille ans, la mort de Jésus engageaient la responsabilité de tous les Juifs, religieux ou athées, pour l’éternité et à travers le temps, de la même manière que les attentats anti-occidentaux d’Al-Qaida ou de toute autre organisation ne sauraient rejaillir sur tous les Arabes et tous les Musulmans, condamnés par l’opinion occidentale à en assumer la responsabilité pour l’éternité.

En raison de la collaboration dont ont fait preuve les autorités françaises avec le régime nazi, durant la 2me guerre mondiale (1939-1945), et de leur contribution à la déportation des Juifs de France vers les camps de concentration, l’antisémitisme est un sujet sensible en France. Accusation infamante, elle condamne quiconque en est l’objet à une sorte d’ostracisme.

L’accusation d’« anti-sémitisme » est en quelque sorte l’arme de destruction massive absolue et équivaut à une condamnation absolue. Elle constitue l’arme de dissuasion par excellence pour neutraliser toute critique à l’égard de la politique israélienne.

Mais à force de la brandir à chaque bout de champ, il est à craindre quelle ne perde de son efficacité. De la même manière, à force de vouloir substituer l’islamophobie à la judéophobie pour se dédouaner de l’antisémitisme traditionnel récurrent à la société française, il est aussi à craindre que l’on ne perpétue une autre forme de racisme, également hideuse, également condamnable.

René Naba’a

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*René Naba, ancien responsable du monde arabo-musulman au service diplomatique de l’Agence France Presse, ancien conseiller du Directeur Général de RMC/Moyen orient, chargé de l’information, est l’auteur notamment des ouvrages suivants :

« Aux origines de la tragédie arabe"- Editions Bachari 2006.
"Du bougnoule au sauvageon, voyage dans l’imaginaire français"- Harmattan 2002.
« Rafic Hariri, un homme d’affaires, premier ministre » (Harmattan 2000).
« Guerre des ondes, guerre de religion, la bataille hertzienne dans le ciel méditerranéen » (Harmattan 1998)

Note

« Une haine imaginaire ? contre-enquête sur le « nouvel antisémitisme » Guillaume Weill-Raynal- Armand Colin-Mars 2005 « le drame est qu’en entretenant ce mythe d’une haine antijuive sous-jacente, notamment dans le traitement du conflit israélo-palestinien par les grands médias, les apprentis sorciers font tout ce qu’il faut pour que la communauté juive, loin d’affronter les défis du contemporain, s’enlise dans une peur, voire un rejet de l’autre qui lui risque de lui faire perdre son âme », écrit notamment Weill Raynal.

jeudi 4 janvier 2007.

http://www.aloufok.net/article.php3?id_article=3285



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5-2 Interview d'Ilan Pappé : 'il ne faut pas confondre le Judaïsme et le Sionisme.

Interview d'Ilan Pappé par Christopher Brown qui explique ce que nous ne cessons de rabâcher, à savoir qu'il ne faut pas confondre le Judaïsme et le Sionisme, que cette idéologie est dangereuse et tant qu'elle aura cours en Israël, il n'y aura pas de paix car les idéologues ne veulent ni Palestine ni paix...



« Le problème en Israël, c’est qu’entre La Paix Maintenant et Avigdor Lieberman, il n’y a, contrairement à ce qu’on dit, pas une si grande distance idéologique. C’est une question de tactique pour savoir comment assurer au mieux un Etat juif avec une forte majorité démographique, sinon exclusive. »

Un cessez-le-feu précaire se maintient dans la Bande de Gaza, après quasiment cinq mois d’une dose massive d’ « Opération Pluies d’Eté » par l’armée israélienne.

Les volées de missiles, les bombardements aériens, les incursions militaires dans des zones peuplées, durant les cinq mois de ces « pluies » torrentielles, ont fait plus de 450 tués, dont un quart d’enfants, et bien au-delà d’un millier de blessés.

Depuis le début des « pluies d’été », nombreux sont ceux qui, dans le camp israélien de la paix, sont restés silencieux sur la crise en cours à Gaza et en Cisjordanie. Pourtant, une voix demeure constante dans les cercles israéliens et continue à se faire entendre en dépit des oppositions.



Christopher Brown : Ehoud Olmert a récemment nommé au titre de vice-premier ministre, Avigdor Lieberman, un homme que certains considèrent comme « fasciste » à la lumière de ses idées à propos des Arabes, et des Palestiniens en particulier. Pourtant, c’est à peine si la presse internationale a évoqué ses déclarations extravagantes et violentes ; par exemple, que tous les Arabes devraient être expulsés des Territoires et que les députés arabes au Parlement israélien devraient être exécutés s’ils ont le moindre contact avec le gouvernement dirigé par le Hamas. Pendant ce temps, chaque mot de Mahmoud Ahmadinejad, le président iranien - à propos du génocide des Juifs tenu pour un canular, à propos de la destruction d’Israël et ainsi de suite - est enregistré pour que nul n’en ignore. Votre réponse ?

Ilan Pappé : Je pense que vous avez mis le doigt sur deux points importants. Le premier point est cette idéologie à laquelle Avigdor Lieberman adhère et qui est une idéologie de nettoyage ethnique. Quelqu’un qui considère que le seul moyen de résoudre les problèmes en Israël/Palestine est d’expulser les Palestiniens d’Israël et de tout territoire qu’Israël convoite.

Je pense que le problème avec Avigdor Lieberman, ce ne sont pas ses vues personnelles mais le fait qu’il reflète ce que la plupart des Juifs israéliens pensent et ce qu’assurément la plupart de ses collègues du gouvernement Olmert pensent mais n’osent pas dire, ou considèrent, pour des raisons tactiques, qu’il n’est pas souhaitable de dire. Mais je pense réellement que nous devrions être inquiet au sujet de Lieberman, non pas parce que c’est un extrémiste fasciste mais parce qu’il représente l’humeur d’Israël en 2006.

Le second point, c’est le double standard, l’hypocrisie que vous avez relevée en comparant à juste titre les citations d’Ahmadinejad qu’on ne cesse de répéter et la manière dont des généralisations et des attitudes semblables ou pires de la part d’Israéliens ne sont pas du tout entendues. Et je pense que cela tient au statut particulier dont Israël jouit dans le monde occidental. [Mais] pas aux yeux de la société civile... [Pour] la plupart des gens qui vivent aujourd’hui en Occident, [Israël] est un pays qui viole les droits de l’homme, les droits civils, et tant son idéologie que sa politique sont inacceptables. Mais les gouvernements continuent de soutenir l’Etat parce que le monde est mené par un président américain et un groupe de gens qui ont un certain point de vue, un point de vue quasiment religieux avec lequel des idées comme celles de Lieberman s’accordent très bien.

La différence n’est pas si grande entre la politique israélienne et la politique américaine en Irak. Et je pense que tant que l’Amérique sera la super-puissance dans le monde et qu’Israël sera son plus proche allié, nous continuerons de voir ce double standard s’appliquer dans les attitudes des gouvernements et dans les principaux médias.

C.B. : Soixante et un universitaires irlandais ont écrit, en septembre, une lettre appelant à un moratoire de l’aide de l’Union Européenne aux universités israéliennes jusqu’à ce qu’Israël se conforme au droit international et aux normes fondamentales des droits de l’homme. En outre, un syndicat d’enseignants canadiens a également appelé à des boycotts académiques. Est-ce un moyen efficace de pression sur le gouvernement israélien afin qu’il s’attaque à l’occupation d’une manière qui amène la justice pour les Palestiniens ?

I.P. : C’est un moyen efficace si ce n’est pas seulement un boycott académique. Un boycott académique n’est qu’une composante de ce qu’on pourrait appeler un boycott culturel d’Israël, parce qu’il serait très difficile, dans ce monde globalisé où nous vivons, d’amener des sanctions économiques - ce qui aurait été le moyen le plus efficace pour forcer Israël à un changement de politique.

Le deuxième meilleur moyen, et davantage réalisable, est que le grand public dans ces sociétés adresse à Israël un message disant que sa politique est inacceptable, que tant qu’il continue à faire ce qu’il fait, il ne peut pas être accepté... Il ne peut appartenir à la communauté des nations civilisées.

Je pense qu’il y a une signification à la fois symbolique et parfaitement politique dans une réaction coordonnée des sociétés occidentales en faveur d’un message, un message clair, qui soit transmis sous forme de boycott de désinvestissement ou tout autre acte symbolique qui dise qu’il y a un prix à payer pour les politiques que vous poursuivez et que tant que vous poursuivrez cette politique, vous ne serez pas les bienvenus ici. Pas en tant que particuliers : vous n’êtes pas les bienvenus si vous représentez une certaine idéologie, un certain Etat, et tout particulièrement si vous vous présentez comme un représentant officiel de cet Etat. Nous ne sommes pas en train d’inventer la roue, évidemment. Le boycott culturel a été une composante tout à fait cruciale dans l’action contre l’Apartheid en Afrique du Sud. D’après des gens qui ont vécu là-bas, il a été utile et très efficace.

A propos d’actions de ce genre, la chose la plus importante dont il faut se rappeler, c’est qu’elles sont non-violentes. On doit montrer aux Palestiniens, et les Palestiniens doivent découvrir eux-mêmes, qu’il y a des options non-violentes pour la poursuite de la lutte contre l’occupation israélienne. Parce que s’ils sont non-violents, qui pourrait blâmer les Palestiniens de recourir à tous les moyens urgents à leur disposition pour essayer d’arrêter une des occupations les plus cruelles et accablantes des temps modernes ?

C.B. : Qu’en est-il de ceux [comme les groupes de lobbying israéliens] qui diraient que proposer un boycott culturel et académique, c’est seconder l’antisémitisme ? Que répondez-vous à cela ?

I.P. : Trois points sont importants, à ce propos. Le premier devrait mettre en lumière le fait que beaucoup de Juifs progressistes et libéraux, tant aux Etats-Unis qu’en Europe, sont engagés dans cette action de boycott culturel. En réalité, au nom de leur identité juive, de leur héritage, de leur compréhension des valeurs juives, ils se sont trouvés aux côtés de ceux qui manifestaient contre les violations des droits de l’homme dans le sud des Etats-Unis, en Amérique du Sud, en Afrique du Sud, dans le Sud-Est asiatique : ils ne voient pas de différences quand il s’agit d’Israël-Palestine. En fait, dans ce cas, même si c’est un Etat juif qui viole des droits de l’homme, cela ne change rien à leur position. Quel que soit celui qui viole les droits de l’homme, ils se dresseront contre lui.

Le second point est que les Israéliens abusent de l’accusation d’antisémitisme contre ceux qui les critiquent. Non seulement ceux qui appellent au boycott, mais même la critique d’Israël la plus légère est dépeinte ici comme un acte d’antisémitisme. Je pense que à l’aide d’une bonne pédagogie, on peut diffuser l’idée qu’il s’agit d’une tactique israélienne qui a très peu à voir avec une montée réelle et actualisée de sentiments antisémites qui, assurément, prévalent dans certaines parties du monde. Peut-être un ou deux antisémites connus se sont-ils joints à la charrette mais cela ne prouve rien. Le fait est qu’Israël tient à être hors d’atteinte de toute critique. Et le bouclier utilisé est toujours l’antisémitisme.

Troisièmement, et c’est plus important, on devrait faire une différence entre sionisme et Judaïsme. Après 60 ans, les mises en œuvre de l’idéologie sioniste sur le terrain, nous pouvons les voir maintenant du point de vue palestinien.

Cette idéologie peut avoir fait quelques bonnes choses pour des Juifs dans le monde, mais s’il est assurément quelque chose qui ne permet pas aux Palestiniens de vivre en paix ou même simplement de vivre dans leur patrie, c’est le sionisme. Il a quelque rapport avec le Judaïsme, mais ne concerne pas le Judaïsme. Cela tourne autour d’une certaine idéologie coloniale encore revendiquée, au 21e siècle, par un Etat qui est un projet inachevé. L’Etat d’Israël n’a pas été bâti convenablement. Comme vous savez, nous n’avons même pas de frontières définitives.

Je pense qu’il est très important de faire comprendre aux gens que ce n’est pas d’une question juive que nous traitons ici ; nous traitons d’une certaine relique de la période coloniale, qui se voit encore autorisée à se poursuivre dans une situation post-coloniale. Et aussi longtemps que cela continue, cela complique les relations entre le monde occidental et le monde arabe et le monde musulman.

C.B. : Le 7 novembre, le parti démocrate a gagné des élections qui vont lui permettre de contrôler le Congrès américain. Les démocrates se sont montrés critiques à l’égard de la politique de l’administration Bush dans sa conduite de la guerre en Irak. Mais le parti a répété que les relations entres les USA et Israël ne seraient pas modifiées. Cette politique est-elle la meilleure ligne d’actions pour les deux pays - sans parler des Palestiniens ?

I.P. : Les résultats des élections à mi-mandat sont à bien des égards une bonne nouvelle pour le public américain. Mais je ne pense pas que les élections vont apporter quelque bonne nouvelle que ce soit dans cette partie du monde. En d’autres termes, je ne pense pas que le renversement dans l’équilibre des forces au sein des deux chambres modifiera la politique américaine à l’égard de la Palestine. Cela peut changer, et cela devrait bien sûr changer, la politique américaine en Irak. Mais je pense que le parti démocrate est aussi engagé dans la protection d’Israël aux dépens des Palestiniens que l’était l’administration républicaine. Je ne pense pas que dans un avenir prévisible, nous devions voir un quelconque changement fondamental dans la politique américaine à l’égard d’Israël.

Vous me demandez si elle devrait changer. Evidemment, elle le devrait. Elle le devrait parce que si le parti démocrate est fidèle à la nouvelle perspective qu’il apporte à la politique américaine - l’idée que les Américains devraient avoir de la retenue dans leur conduite internationale, que le recours à la force en Irak était une erreur, et que l’image et le statut de l’Amérique dans le monde sont problématiques - si c’est effectivement là le message des démocrates, alors je pense qu’ils devraient prêter attention au fait que le statut et la position des Américains dans le monde ne sont pas seulement affectés par l’invasion de l’Irak mais aussi par le soutien inconditionnel que l’Amérique accorde à Israël aux dépens des Palestiniens.

Je pense qu’ils devraient se rendre compte que seul un changement d’attitude à l’égard d’Israël et une approche plus honnête du conflit peuvent réellement apporter un changement constructif dans la relation entre les Etats-Unis et le monde arabe ; après tout, le monde musulman représente un quart de la population du globe.

C.B. : « La Paix Maintenant » a découvert que pour environ 40% de leur superficie, les colonies, y compris des communautés existant de longue date, sont construites sur des terres palestiniennes privées et non pas sur des terres détenues par l’Etat. La Paix Maintenant a obtenu cette information d’une source à l’intérieur de l’Administration civile qui souhaitait exposer les violations à grande échelle des droits palestiniens à la propriété par le gouvernement et les colons. Croyez-vous qu’il y a davantage de gens au sein du gouvernement à être en désaccord avec le traitement qui est fait aux Palestiniens et qui voudraient s’exprimer ouvertement ?

I.P. : Peut-être y en a-t-il davantage mais je crois que ce n’est pas assez. Ce genre de critique faite par La Paix Maintenant autour d’une information qu’ils nous divulguent, est très importante. Mais il ne faut pas oublier un instant que chaque centimètre carré qui a été pris par Israël est une occupation illégale et pas seulement les 40% de terres privées.

C’est peut-être une violation plus flagrante mais toute la présence israélienne là est une violation des droits civils et humains. Ce qu’il faut, c’est bien plus que ce genre de critique. Le problème en Israël, c’est qu’entre La Paix Maintenant et Avigdor Lieberman, il n’y a, contrairement à ce qu’on dit, pas une si grande distance idéologique. C’est une question de tactique pour savoir comment assurer au mieux un Etat juif avec une forte majorité démographique, sinon exclusive.

Lieberman dit : « Prenons tout territoire dont nous avons besoin et réalisons cet objectif en réduisant le nombre d’Arabes qui vivent là ». La Paix Maintenant dit : « Non, prenons moins de terres et réduisons le territoire plutôt que la population et alors, nous pourrons avoir cet Etat offrant une suprématie juive exclusive [‘supremacist’] que nous convoitons. Ces deux positions sont moralement et politiquement mauvaises et inacceptables parce qu’au bout du compte, vous avez 20 à 30 % de la population d’Israël qui est palestinienne, même dans le plus petit Etat que La Paix Maintenant convoite, et que La Paix Maintenant n’entend pas les tenir pour des citoyens égaux.

Et les gens, y compris dans La Paix Maintenant, mettront l’idée d’un Etat juif au-dessus de tout manquement à la démocratie. Dès lors, je pense que même si j’avais trouvé, au sein du gouvernement ou de l’administration, des gens qui souhaitent un mode d’occupation plus propre, une occupation plus légitimée, bien sûr je les aurais salués, mais je mets en garde sur le fait qu’ils étaient là avant : ces gens ont même été au gouvernement et ils n’ont apporté aucun changement, parce que la raison du conflit en cours entre Israël/Palestine n’est pas l’occupation par Israël de parties de la Cisjordanie et de Gaza et le fait qu’Israël ne veut pas les restituer. La raison de ce conflit, c’est l’idéologie sioniste. C’est là que le conflit commence et c’est là qu’il finit. Tant que la grande majorité des Juifs en Israël souscriront à cette idéologie, dans son interprétation actuelle, je crains que nous ne voyions venir ni paix ni réconciliation dans ce pays.

C.B. : Finalement, Ilan Pappe, que peuvent faire les gens qui espèrent la sécurité tant pour les Israéliens que pour les Palestiniens ?

I.P. : Ma foi, je pense que chacun a son rôle à jouer, en particulier ceux qui s’en soucient, ceux qui font partie d’Israël/Palestine ou qui se préoccupent d’Israël/Palestine. Je pense que les Palestiniens ont leur rôle de résistance ; les forces progressistes en Israël continuent d’essayer d’informer et de modifier le point de vue de leurs compatriotes.

Mais la société extérieure doit jouer le même rôle que celui joué, en Occident, par le mouvement anti-apartheid, à l’apogée de l’Apartheid. Nous avons besoin d’un lobby puissant à l’intérieur du monde occidental - en particulier aux Etats-Unis mais aussi en Europe. Ce lobby devrait envoyer un message clair à l’adresse d’Israël, disant : votre politique et votre idéologie sont inacceptables, en particulier si vous voulez faire partie du monde démocratique, et il est nécessaire pour nous que vous modifiiez votre politique et ayez, sur le terrain, une société beaucoup plus démocratique.

Israël a besoin d’un appel au réveil. Les Israéliens ne savent pas ce que le monde pense d’eux et je pense que les sociétés civiles dans le monde peuvent être, et qu’elles devraient être, leur réveille-matin.

Christopher Brown - A rare voice : An interview with author Ilan Pappe

Sources Info Palestine

Le professeur Ilan Pappe est professeur d’histoire à l’Université de Haïfa. Il a écrit de nombreux articles à propos du conflit israélo-palestinien et n’a cessé d’appeler ouvertement au boycott académique aussi bien que culturel d’Israël.

Ces déclarations ont fait de lui un scion, un rejet aux yeux du gouvernement israélien et du public, mais il continue d’aller de l’avant avec un espoir de réconciliation et de justice avec les Palestiniens. Sa dernière contribution consiste en un nouveau livre : The Ethnic Cleansing of Palestine (Oneworld Publications, 2006).

Christopher Brown, collaborateur à Electronic Intifada, a eu récemment un échange téléphonique avec le professeur Pappé à propos de la situation actuelle en Israël/Palestine.

Posté par Adriana Evangelizt

Mercredi 10 Janvier 2007

From:


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5-3 Salman Abu Sitta ; Traces de poison : La sombre histoire d'Israël .
L'historien palestinien Salman Abu-Sitta a écrit en 2003 cet article très intéressant qui traite d'un épisode inconnu de la guerre 1948.
Il montre que les dirigeants israéliens ont utilisé des armes biologiques avant même que l'Etat d'Israel soit créé, sous le nez des impérialistes britanniques pendant les derniers jours de leur Mandat.
Les sionistes évidemment le nient mais les plus de 4 millions de bombes déversées sur la population civile lors de la dernière guerre du Liban indiquent l'ampleur de la barbarie des dirigeants israéliens et ce dont ils sont capables.
À l'époque où les écrans de télévision sont remplis d'images de soi-disant Armes de Destruction Massive (ADM) en Irak sur une population au bord de la famine, l'Occident ferme les yeux sur le premier terroriste biologique du Moyen-Orient, Israël, où se trouve le plus important dépôt d'ADM entre Londres et Pékin.
Quand il est confronté à cette anomalie, l'ambassadeur des Etats-Unis aux Nations-Unies, John Negroponte, répond avec son cynisme habituel, "Israël n'a utilisé ces armes ni contre sa population ni contre ses voisins."
En supposant que l'ambassadeur soit bien informé, cette déclaration est un pur mensonge. Israël a utilisé des armes biologiques avant même qu'il soit créé sur le sol arabe en 1948 et depuis.
L'objectif est, selon Ben Gurion, un génocide, et si celui-ci n'est pas totalement réalisé, l'objectif est d'empêcher les Palestiniens dépossédés de revenir dans leurs maisons.

EMPOISONNER LES RESSOURCES EN EAU D'ACRE
À la suite de l'occupation d'Haïfa par les sionistes le 23 avril 1948, à la barbe des forces du Mandat Britannique commandées par le Général Stockwell, homme que l'histoire critique toujours pour cet échec, des milliers de gens ont convergé vers Acre, ville voisine, qui était toujours Arabe sous la "protection" des forces Britanniques.

Acre était la prochaine cible sioniste. Les Sionistes ont assiégé la ville depuis la terre, et ils ont commencé à arroser la population, jour et nuit, d'une pluie d'obus de mortier. Célèbre pour ses murs historiques, Acre a pu longtemps tenir le siège.

L'approvisionnement en eau de la ville venait par aqueduc d'un village voisin, Kabri, à environ 10kms au nord. Les Sionistes ont injecté la typhoïde dans l'aqueduc à quelque endroit intermédiaire où il traverse des colonies sionistes. (voir la carte)

On peut maintenant raconter l'histoire grâce aux dossiers du Comité International de la Croix Rouge (CICR) qui sont maintenant disponibles, 50 ans après l'événement.

Une série de rapports, sous la référence G59/1/GC, G3/82, envoyés par M. de Meuron, le délégué du CICR, entre le 6 mai et le 19 mai 1948, décrivent les conditions de vie de la population de la ville, frappée par une soudaine épidémie de typhoïde et les efforts pour la combattre.

Le compte rendu d'une conférence tenue en urgence à l'hôpital Libanais de la Croix Rouge à Acre le 6 mai pour traiter l'épidémie de typhoïde est d'une importance toute particulière.
Assistaient à la réunion : le Général de Brigade Beveridge, le chef des services médicaux britanniques et le Colonel Bonnet de l'armée britannique, le Dr Maclean des services médicaux, M. de Meuron, délégué du CICR et d'autres responsables de la ville.

Le compte-rendu déclarait qu'il y avait au moins 70 victimes civiles connues, que d'autres n'étaient peut-être pas signalées.

Il a été déterminé que l'infection était "transmise par l'eau", non pas en raison des conditions peu hygiéniques ou de l'entassement des personnes, comme le prétendaient les Israéliens.

Il a été décidé de substituer cet approvisionnement par de l'eau provenant de puits artésiens ou de la station agricole, située juste au nord d'Acre (voir la carte), et non de l'aqueduc.

Des solutions de chlore ont été mélangées à l'eau, la vaccination de la population civile a commencé, les déplacements de la population civile ont été contrôlés (de peur que les réfugiés se dirigeant vers le Nord, vers le Liban, propagent l'épidémie de Typhoïde, comme l'avaient prévu les sionistes).


Dans ses autres rapports, de Meuron a mentionné 55 victimes parmi les soldats britanniques, qui ont été hospitalisés à Port Said.

Le Général Stockwell a mis à la disposition de de Meuron un avion militaire pour qu'il aille à Jérusalem chercher des médicaments. Les Anglais, qui laissaient la Palestine entre les mains des Juifs, ne voulaient pas qu'un autre incident embarrassant retarde leur départ.

Le Général de Brigade Beveridge a dit à de Meuron que c'était "la première fois que cela se produisait en Palestine". Cela récuse l'histoire israélienne, y compris celle de l'historien israélien, Benny Morris, qui déclare que l'épidémie était due "aux conditions peu hygiéniques" des réfugiés.

Si c'était le cas, comment se fait-il qu'il y ait eu un nombre presque identique de victimes parmi les soldats britanniques ?

Pourquoi ces conditions de vie n'ont-elles pas causé d'épidémie dans les autres lieux de concentrations de réfugiés, qui vivaient dans des conditions bien pires, à Jaffa, à Lod, à Nazareth et à Gaza ?

Le délégué du CICR, de Meuron, a admiré les efforts héroïques des médecins arabes, Al-Dahhan et Al-Araj de l'hôpital libanais de la Croix Rouge à Acre, le Dr Dabbas et Mme Bahai, de Haïfa.

La ville d'Acre, accablée par l'épidémie, est tombée facilement entre les mains des Sionistes. Ils ont intensifié leurs bombardements. Des haut-parleurs placés sur des camions ont proclamé : "Rendez-vous ou suicidez-vous. Nous vous détruirons jusqu'au dernier homme." Ce n'était pas un terme de rhétorique.

Palumbo, dans La Catastrophe Palestinienne, note le cas "typique" de Mohamed Fayez Soufi.
Soufi était allé avec des amis chercher de la nourriture dans leurs maisons situées dans une nouvelle banlieue d'Acre.
Ils ont été pris par des soldats sionistes et forcés, sous la menace des armes, à boire du cyanure.
Soufi a fait semblant d'avaler le poison. Les autres n'ont pas été aussi chanceux, ils sont morts dans la demi-heure.


Le Lieutenant Petite, un observateur français des Nations-Unies, a rapporté que le pillage était effectué de manière systématique par l'armée, qui emmenait les meubles, les vêtements et tout ce qui pouvait être utile aux nouveaux immigrés juifs et que cela faisait également partie "d'un plan juif pour empêcher le retour des réfugiés".
Le Lieutenant Petite a également rapporté que les Juifs avaient assassiné 100 civils arabes à Acre, en particulier ceux qui refusaient de partir.


D'autres horreurs ont été rapportées par de Meuron. Il a parlé "d'un règne de la terreur" et du cas du viol d'une fille par plusieurs soldats et du meurtre de son père.

Il a également écrit que tous les civils masculins avaient été emmenés dans des camps de concentration et considérés comme des "prisonniers de guerre" alors qu'ils n'étaient pas des soldats.


Ceci a laissé beaucoup de femmes et enfants sans-abri, sans protection et soumis à de nombreux actes de violence. Il a également noté l'absence d'eau et d'électricité.
Il a exigé des sionistes une liste de civils détenus en tant que "prisonniers de guerre" et il a exigé de savoir où ils étaient et la permission de leur rendre visite.


Plus important, il a demandé qu'Acre soit placée sous la protection et les soins du CICR. Toute personne qui connaît le langage sec et prosaïque habituel du CICR ne manquera pas de noter le ton d'horreur des actions sionistes dans les rapports sur Acre rédigés par de Meuron rédigés à Acre.

Cet épisode, qui a commencé par l'empoisonnement de l'eau d'Acre et s'est terminé par l'effondrement de la ville, le dépeuplement de ses habitants et son occupation par les Juifs, a aiguisé leur appétit pour renouveler ce crime.



EMPOISONNEMENT DE GAZA :

Deux semaines plus tard, après leur "succès" à Acre, les sionistes ont encore frappé. Cette fois à Gaza, où des centaines de milliers de réfugiés s'étaient rassemblés après l'occupation de leurs villages dans le Sud de la Palestine. Le but cependant était différent.

Le câble ci-dessous a été envoyé par le commandant des Forces Egyptiennes en Palestine à son quartier général au Caire :

"15h20, 24 Mai (1948) – Nos Renseignements ont capturé deux Juifs, David Horeen et David Mizrahi, qui erraient autour des positions de l'armée.
Ils ont été interrogés et ils ont admis avoir été envoyés par l'officier Moshe pour empoisonner l'eau de l'armée (et de la population). Ils portaient sur eux des bouteilles d'eau séparées au milieu. La partie supérieure était de l'eau potable et la partie inférieure contenait un liquide contaminé par la typhoïde et la dysenterie ; le cul des bouteilles étaient équipées d'une ouverture d'où le liquide pouvait sortir. Ils ont avoué faire partie d'une équipe de 20 hommes envoyée depuis Rehovot dans le même but.
Tous les deux ont écrit leur confession en hébreu et l'ont signée. Nous avons pris les précautions médicales nécessaires."


Dans le Journal de Guerre de Ben Gurion, on trouve la déclaration suivante, datée du 27 mai 1948 :

"(Le Chef d'Etat-Major Yigel Yadin) a intercepté un câble envoyé de Gaza disant qu'ils ont capturé des Juifs portant des germes de la malaria et qu'ils ont donné des instructions de ne pas boire l'eau".
Ceci est typique de la façon dont Ben Gourion ré-écrit l'histoire. Il connaissait parfaitement le poids de l'histoire quand de tels crimes seraient découverts.
Les procès de Nuremberg ne s'étaient déroulés que trois ans auparavant.

D'autres informations sur le contexte de ce câble sont mentionnées dans le livre de Yeruham Cohen, In Daylight and Night Darkness, Tel Aviv, 1969, pp66-68 (en hébreu).

Les criminels ont été exécutés trois mois plus tard.
Le 22 juillet 1948, le Haut Comité Arabe palestinien (HCA) a soumis un rapport de 13 pages aux Nations Unies accusant les Juifs d'utiliser les armes "inhumaines" et de mener une guerre de génocide contre les Arabes par l'utilisation de bactéries et de germes, développés dans des laboratoires spécialement construits à cet effet.

Le rapport accuse également les Juifs (le mot Israël n'était pas encore utilisé) de propager le choléra en Egypte et en Syrie en 1947/48.

L'histoire a été reprise par le journaliste lauréat d'une récompense, Thomas J Hamilton, dans le New York Times publiée le 24 juillet 1948. L'histoire subit alors un nouveau tournant en ajoutant l'Egypte et la Syrie au champ des opérations juives.


CHOLERA EN EGYPTE ET EN SYRIE:

L'été 1947 fût chaud au niveau diplomatique. Le Comité Spécial des Nations Unies en Palestine (UNSCOP) était occupé à visiter la Palestine et les pays arabes afin de proposer une partition de la Palestine pour que les nouveaux immigrés juifs, qui contrôlaient seulement 6% de la Palestine sous le Mandat Britannique, reçoivent un gros morceau de la Palestine (qui s'est avéré être de 54%) afin d'établir un Etat étranger au milieu de la terre arabe.

Les Arabes, toujours sous tutelle de la Grande-Bretagne, discutaient de la façon de résister au plan soutenu par les Occidentaux pour prendre leurs terres.

Les forces sur lesquelles on pouvait compter étaient les pays voisins ayant des frontières communes avec la Palestine.
Le Liban était faible.
La Trans-Jordanie était toujours directement contrôlée par les Anglais et le Roi Abdullah était conciliant envers les Juifs.
Restaient l'Egypte, le pays arabe le plus fort et la Syrie, récemment libérée des griffes du Mandat Français.

La Syrie était le centre de la résistance arabe à l'occupation étrangère de la Palestine. Des centres d'entraînement avaient été établis à Qatana pour préparer les volontaires arabes à entrer en Palestine sous la bannière "de l'armée arabe de sauvetage". L'Egypte et la Palestine étaient ainsi les cibles les plus importantes.

Dans son rapport de 220 pages continuellement mis à jour, intitulé : Bioterrorisme et Biocrimes: L'utilisation illicite d'agents biologiques depuis 1900, de février 2001, le Dr W Seth Carus du Centre de Recherches de Contreprolifération, Université de Défense Nationale, Washington, DC, liste le sous-titre suivant, p.87 : Affaire 1947-01 : Terroristes "Sionistes" 1947-1948.

Dans ce paragraphe, il mentionne que les manifestations du choléra en Syrie et en Egypte ont suscité une large attention dans la presse internationale.
Le premier reportage au sujet du choléra en Egypte a été publié dans le Times de Londres le 26 septembre 1947, p.4.
Avant que les derniers cas apparaissent en janvier 1948, 10.262 personnes sont mortes.

Il déclare également que le déclenchement de l'épidémie en Syrie était beaucoup moins important. Elle était limitée à deux villes, située à environ 60 kilomètres au sud de Damas, c.-à-d. près de la frontière avec la Palestine.

Le premier reportage est paru dans le New York Times du 22 décembre 1947, p.5.
"L'armée syrienne a formé un cordon sanitaire et les victimes ont été limitées à 44, dont 18 décès."

Peu après, le journal de langue française de Beyrouth, L'Orient, a rapporté que plusieurs agents sionistes, qui utilisaient le choléra pour perturber la mobilisation de l'armée des volontaires, avaient été arrêtés. On ne sait pas ce qu'ils sont devenus.

Ces incidents, ainsi que l'empoisonnement de Gaza, déclare Carus, ont été décrits dans la plainte adressée par le HCA à l'ONU et cite le rapport en disant que :
"Les Juifs projettent d'utiliser cette arme inhumaine contre les Arabes au Moyen-Orient dans leur guerre d'extermination."

Carus ajoute des informations d'autres sources au sujet de l'empoisonnement de Gaza. Rachel Katzman, la soeur de Horeen, dit, selon Carus : "J'ai rencontré l'un des commandants (de mon frère) lors d'une conférence à Jérusalem. Je lui ai demandé si mon frère avait vraiment essayé d'empoisonner des puits. "C'étaient les armes que nous avions" dit-il "et voilà."

Carus ajoute également une autre source au sujet de l'empoisonnement d'Acre : Cette source déclare : "Ce compte-rendu affirme également que les Israéliens ont empoisonné l'approvisionnement en eau de la ville arabe d'Acre, entraînant une épidémie importante, ainsi que dans d'autres villages arabes, pour empêcher les villageois de revenir, en citant l'historien militaire Uri Milstein comme source." (Wendy Barnaby, les fabricants de la peste : Le monde secret de la guerre biologique, Londres, Vision Paperbacks, 1997, pp114-116).

L'auteur a obtenu une copie d'un e-mail dans lequel un pacifiste israélien interrogeait Uri Milstein au sujet de l'histoire de l'empoisonnement d'Acre.
Milstein, historien militaire, est décrit dans l'e-mail comme quelqu'un de "très bien informé, intelligent, courageux, original, honnête" -- bien que ses opinions appartiennent à l'extrème-droite israélienne (!).

Milstein a répondu :
"Je suis désolé de le dire, mais l'histoire est vraie et le nom de l'opération était "Shlach Lachmecha" – ce qui veut dire "donnez votre pain", qui fait partie d'une expression hébreu : donnez votre pain parce que tôt ou tard vous le récupérerez, ce qui signifie que vous devez être généreux et un jour, vous en profiterez vous-même. N'est-ce pas un joli nom pour une opération qui utilise des armes biologiques ?"



COMMENT BEN GOURION A-T-IL COMMENCE TOUT CELA ?

Le 4 mars 1948, Ben Gurion a écrit une lettre à Ehud Avriel, l'un des membres de l'Agence Juive en Europe, en lui ordonnant de recruter des scientifiques juifs d'Europe de l'Est qui pourraient "soit augmenter (notre) capacité à tuer en masse soit à guérir en masse ; les deux sont importants".
Cette citation tronquée est donnée par Avner Cohen qui a cité un auteur du Centre de Recherches Ben Gurion à Sdeh Boker.
Pour comprendre la signification de cette citation, nous devons nous souvenir de la doctrine de Ben Gurion : la destruction de la société palestinienne en Palestine est une condition nécessaire pour l'établissement de l'Etat d'Israël sur ses ruines. Comme corollaire à cette doctrine, le nettoyage ethnique est devenu partie intégrale du Sionisme.
Si les Palestiniens ne disparaissent pas par des massacres et des expulsions, ils disparaîtront par "extermination".
Ces mots ont été spécifiquement utilisés dans la lettre du HCA mentionnée ci-dessus.

L'importance de ce terme est qu'il était rarement utilisé par les Arabes au sujet de leur destin. Les horreurs de l'Europe étaient vagues ou peu connues à l'époque.

La mise en garde par Ben Gurion "de guérir des masses" est encore une autre torsion de Ben Gurion qui avait un oeil sur l'histoire.
Parce qu'il est inconcevable que les Arabes aient eu la capacité ou la volonté en 1948 de pratiquer "le massacre de masse" des Juifs à l'aide d'armes biologiques.
Comme cela s'est produit, Ben Gurion fut le premier à utiliser de telles armes. Son legs, beaucoup plus raffiné et étendu, reste vrai encore aujourd'hui.

Avner Cohen, un camarade du Centre pour les Etudes Internationales et de Sécurité, et du Programme sur la Sécurité et les Désarmements à l'Université du Maryland, a écrit un article complet sur les armes biologiques et chimiques d'Israël qui a été publié dans le Non-Proliferation Review, en automne 2001.

Malgré son contexte qui fournit une compréhension sympathique aux motivations d'Israël, son article expose en 50 pages de détails, de sources libres et de quelques interviews, la création et le développement du centre de terrorisme biologique d'Israël.

Ben Gurion était déterminé à atteindre cet objectif extraordinaire et fort peu probable : enraciner Israël au cœur du monde arabe. "Nous sommes inférieurs aux autres peuples en nombre, mais personne ne nous est supérieur en prouesses intellectuelles", remarquait Ben Gurion.
Dans les année 1940, il avait réuni autour de lui Ernst David Bergmann, Avraham Marcus (Marek) Klingberg (de l'Armée Rouge) et les frères Aharon et Ephraim Katachalsky (Katzir) – tous experts en microbiologie. Ils formèrent le noyau du "Science Corps" dans la Haganah pendant le Mandat Britannique.
Ephraim Katachalsky avait été nommé commandant de cette nouvelle unité, renommée HEMED, en Mai 1948.
Un conflit a éclaté entre Chaim Weizmann qui souhaitait établir un institut scientifique pour la science "propre", alors que Ben Gurion insistait pour établir un centre "sale" pour les armes biologiques. Tous les deux ont vu leurs souhaits se réaliser.
L'institut Weizmann pour la recherche scientifique a été construit à Rehovot.
Une nouvelle unité à l'intérieur de l'HEMED, consacrée aux armes biologiques et appelée HEMED BEIT, a été formée en tant que branche de l'armée israélienne. Son directeur était Alexandre Keynan, un microbiologiste de l'école médicale à l'Université Hébraïque à Jérusalem.
Avec le dépeuplement de 530 villes et villages palestiniens pendant la Nakba de 1948, beaucoup de bâtiments et de maisons se sont vidés et plus de la moitié des immigrés juifs y ont été logés dans les années 50.
Le chef d'Etat-Major Yigal Yadin a choisi, pour abriter la nouvelle unité de développement d'armes biologiques, un manoir situé dans une grande orangeraie à l'ouest de Nes Ziona.
Cette unité, connue sous le nom d'Institut pour la Recherche Biologique d'Israël (IIBR), est toujours là aujourd'hui.
Le bâtiment a été agrandi, il est entouré par un mur de trois mètres de haut, des sondes de détection de mouvement et des tours d'observation.
Tandis que l'IIBR représente la façade d'une institution scientifique, produisant des articles "propres" et recevant des invitations aux conférences scientifiques, le développement des véritables armes biologiques est réalisé à l'intérieur de l'IIBR dans un centre classé secret défense (Machon 2, l'un des quatre) financé et contrôlé directement par le Ministère de la Défense.
Le site internet d'IIBR déclare que le personnel de l'institut comprend 300 employés, dont 120 d'entre eux sont titulaires d'un Doctorat, en plus de 100 techniciens certifiés.
Mais ces chiffres sont faux parce qu'il y a beaucoup d'autres scientifiques qui occupent des postes dans des services de microbiologie dans les facultés de Médecine à l'Université de Tel Aviv et à l'Université Hébraique de Jérusalem
Ephraim Katzir a été récompensé pour service rendu à l'Etat en étant élu président d'Israël en 1973. Aharon Katzir a été tué dans l'attaque japonaise contre l'aéroport de Lod le 30 mai 1972.
Peu après l'empoisonnement d'Acre et de Gaza, Ben Gurion a lancé un projet pour développer "des capacités non conventionnelles bon marché" en 1955.
Pourquoi cette précipitation ? Comme l'indique Cohen, Munya Mardor, le fondateur de l'Autorité de Développement des Armes d'Israël (RAFAEL), dit que Ben Gurion "était de toute évidence concerné par le fait que nous ne puissions pas réussir avant la date limite qu'il avait fixée, inquiet que l'ennemi puisse avoir cette capacité et que nous n'ayons rien pour le décourager ou exercer des représailles".
Il s'est avéré que la précipitation avait pour but d'être prêts pour la date de l'agression tripartite contre Suez de 1956.
Ben Gurion était prêt à bombarder l'Egypte avec des armes biologiques si sa campagne échouait.
Comme si ce n'était pas suffisant, Israël a signé un accord avec la France pour mettre en place un programme nucléaire la même année.
L'émissaire de Ben Gurion en France n'était autre que le diplomate amoureux de la paix, Shimon Pensky (Perez).
Anver Cohen dit que la localisation de l'IIBR est classée secret-défense et n'est indiquée sur aucune carte ou photographies aériennes. Il est pourtant possible de déterminer sa localisation avec exactitude.


OU EST L'IIBR?
Dans les années 30, la route entre Ramleh et Nabi Rubin, un site religieux populaire visité chaque année, traverse Wadi Hunein, un sol sablonneux avec quelques marais.
La riche famille Al-Taji Al-Farouki de Ramleh avait acheté une partie importante de cette terre et y exploitait des plantations de citrus qui étaient exportés par centaines de milliers de caisses marquées "oranges de Jaffa" vers l'Europe.
Shukri Al-Taji s'y était construit un beau manoir (photo) sur le sommet d'une colline -- un bâtiment rectangulaire de deux étages situé sur une parcelle de 134.029 m².
Le numéro de la parcelle de terrain est 549/32 et le titre de propriété est inscrit au Registre des Terres sous le n° E42/260 le 16 mars 1932.
Il a également construit une mosquée sur la route goudronnée entre Jaffa et Qubeiba.
Sur une autre colline, à un kilomètre à l'ouest, son cousin Abdel-Rahman Hamed Al-Taji avait construit une maison composée de plusieurs bâtiments.
Les manoirs au milieu de vastes orangeraies montraient une scène idyllique dans un environnement tranquille.
C'est l'endroit que Yigal Yadin a choisi pour sa recherche sur les armes biologiques. Le manoir de Shukri Al Taji est devenu la maison de l'IIBR.
Le site internet de l'IIBR (www.iibr.gov.il) montre fièrement sur sa première page l'entrée du bâtiment, qui n'est rien d'autre que le manoir des Shukri avec sa façade ornée d'arches et ses grands arbres luxuriants (comparez avec la photo ci-dessus).
Shukri est mort de chagrin au Caire, quelques dix années après.
Si vous partez de Nes Ziona vers l'ouest sur la route 4303, tournez à gauche sur la route 42 en direction du Sud, vous trouverez l'IIBR sur votre droite, à peu près à 500 mètres. (voir la photo de la localisation)
Les coordonnés de l'IIBR sont :
Selon la grille Palestine/Israël : 128.263 E, 147.022 N
Nouvelle grille israélienne : 178.263 E, 647.022 N
Coordonnés géographiques : E 34D 46' 27 N 31D 55' 7
L'endroit est appelé "Ayalon" en hébreu. Directement à l'ouest sur la côte, il y a la plate-forme de lancement de missiles de Palmahim.

Les autres bâtiments d'Al-Taji ont été expropriés et utilisés.
La mosquée est transformée en synagogue, appelée "gulat Israel".
La maison d'Abdel-Rahman a été transformée en hôpital psychiatrique.

POURCHASSER LES COUPABLES

Sara Leibovitz-Dar est une journaliste d'investigation tenace. Le traumatisme vécu par ses parents dans leur Lituanie natale lui a laissé une marque indélébile. Elle déteste l'injustice et, en particulier, son acceptation silencieuse.
Elle a étudié l'empoisonnement de Gaza et d'Acre et la destruction de l'avion libyen civil.
L'historien militaire israélien, Uri Milstein, a identifié pour elle les officiers responsables des crimes biologiques.

En 1993, Sara a essayé d'interviewer le commandant qui était responsable de l'empoisonnement d'Acre. Il a refusé de parler.
"Pourquoi êtes-vous à la recherche de problèmes qui se sont déroulés il y a 45 ans ?" a-t-il demandé.
'Je ne sais rien sur le sujet. Qu'obtiendrez-vous en le publiant ?"

Sara a interviewé l'officier responsable de l'empoisonnement de Gaza. Il a refusé de répondre, "Vous n'obtiendrez aucune réponse à ces questions. Ni de moi et ni de quiconque."

Sara a persisté. Elle a demandé au Colonel Shlomo Gur, l'ancien chef de l'HEMED, s'il était au courant des opérations secrètes en 1948.
"Nous avons entendu parler des épidémies de typhoïde à Acre et des opérations de Gaza. Il y avait beaucoup de rumeurs mais je ne savais pas si elles étaient vraies ou non" a-t-il répondu.

Sara a publié ses résultats dans le Hadashot sous le titre "Microbes dans le service d'Etat", le 13 août 1993, pp6-10. Sara, qui travaille maintenant à Ha'aretz, concluait par le commentaire suivant :
"Ce qui a été fait à l'époque avec une conviction et un fanatisme profonds est maintenant caché avec honte".

Fidèle à la tradition israélienne, Sara a refusé par deux fois de répondre par e-mail à une demande de l'auteur.

Ils n'ont pas tous peur de parler.

Naeim Giladi est un juif irakien qui a été attiré en Israël par des agents du Mossad au début des années 50.
Travaillant avec le fanatisme et le dévouement d'un nouveau sioniste, il a rapidement découvert qu'à l'intérieur de l'establishment Ashkenaze, "il n'y avait pas beaucoup d'opportunités pour ceux d'entre nous qui étions des citoyens de seconde classe", a-t-il indiqué au rédacteur de The Link à New York où il a émigré après avoir quitté Israël.

"J'ai commencé à découvrir les méthodes barbares utilisées pour débarrasser l'Etat naissant d'autant de Palestiniens que possible. Le monde recule aujourd'hui à l'idée d'une guerre bactériologique, mais Israël a été probablement le premier à l'utiliser réellement au Moyen-Orient.
Les forces juives vidaient les villages arabes de leur population souvent par des menaces, parfois en descendant une demi-douzaine de jeunes hommes de telle sorte que les Arabes ne puissent pas revenir. Les Israéliens ont mis des bactéries de typhus et de dysenterie dans les puits pour empêcher les réfugiés de revenir." (The Link, Vol. 31, Issue 2, avril-mai 1998).

Un autre témoin qui a parlé, un ancien agent du Mossad, Victor Ostrovsky, affirme que des tests mortels ont été pratiqués sur des prisonniers arabes à l'intérieur du bâtiment de l'IIBR.

L'ENQUETE HOLLANDAISE :

Le 4 octobre 1992 à 18h21, le vol 1862 d'El Al est parti de l'aéroport Schiphol d'Amsterdam en direction de Tel Aviv, avec à son bord trois membres d'équipage, un passager et 114 tonnes de fret.
Sept minutes plus tard, il s'est écrasé contre une barre d'immeubles à Bijlmer.

Le vol 1862 d'El Al est le pire désastre aérien dans l'histoire hollandaise, tuant au moins 47 personnes (le nombre réel est inconnu parce que beaucoup de victimes étaient des immigrés) et a détruit la santé de 3000 résidants hollandais.

Des cas de maladies mystérieuses, de rougeurs, de difficultés respiratoires; de troubles nerveux et de cancers ont commencé à surgir dans ce quartier et au-delà.

Le gouvernement hollandais, de connivence avec Israël, a menti à ses citoyens en disant que l'avion transportait des parfums et des fleurs. Quelques fleurs !
Il a fallu plusieurs années à l'énergique et opiniâtre rédacteur scientifique du quotidien Néerlandais NRC Handelsblad, Karel Knip, pour découvrir les faits. Knip a publié le 27 novembre 1999 l'enquête la plus détaillée et étayée sur les manoeuvres du terrorisme biologique de l'IIBR.

D'abord il a découvert que l'avion transportait 220 litres, entre autres, de DMMP, substance utilisée pour fabriquer un quart de tonne de Sarin, gaz neurotoxique 20 fois plus mortel que le cyanure.
Il transportait une cargaison provenant de Solkatronic Chemicals de Morrisville, en Pennsylvanie, destinée à l'IIBR en Israël, sous licence du Ministère du Commerce américain. Ce qui est contraire à la Convention sur les Armes Chimiques (CAC) dont sont signataires les Etats-Unis, mais pas Israël.

Avecdétermination et ténacité, Knip a passé en revue la littérature scientifique produite par l'IIBR et les services de microbiologie de la faculté de Médecine de l'Université de Tel Aviv et de l'Université Hébraique depuis 1950. Il a pu identifier 140 scientifiques impliqués dans la recherche sur les armes biologiques (AB).

Ce chiffre pourrait être plus important car des scientifiques ont des doubles postes ou se déplacent. Beaucoup prennent invariablement leurs congés sabbatiques aux Etats-Unis.

Il y a des liens très forts avec le Walter Reed Army Institute, l'Uniformed Services University, l'American Chemical and Biological Weapons (CBW) Center à Edgewood et l'Université de l'Utah.

De façon remarquable, Knip a pu identifier trois catégories des productions de l'IIBR : les maladies, les toxines et les convulsifs, et leur développement à chaque décennie depuis les cinq dernières.

La recherche s'est déplacée des virus et des bactéries aux toxines parce qu'ils sont beaucoup plus toxiques. Les gaz neurotoxiques connus sous le nom de Tabun, Soman, Sarin, VX, Cyclo-Sarin, RVX et Amiton sont tous des gaz mortels et fonctionnent de la même façon.

Knip est allé plus loin. Il a cherché l'aide d'experts dans ce domaine comme le Professeur Julian Perry Robinson, de l'Université du Sussex à Brighton, le Dr Jean Pascal Zanders de SIPRI à Stockholm et le Professeur Malcolm Dando, de l'Université de Bradford.
Ils l'ont guidé dans sa recherche et lui ont expliqué ses découvertes.

Knip a également découvert une coopération étroite entre l'IIBR et le programme britannico-américain sur les Armes Biologiques. Ce programme travaille sur la propagation des virus et des bactéries par les rongeurs et les insectes et couvre la variole, les maladies fongiques et la maladie du Légionnaire.

Il faut noter que cette maladie est apparue à Philadelphie il y a quelques années, et, étonnamment, dans un hôtel d'Eilat mi-janvier 2003.

L'intérêt dans l'usine de poison Elate-Ricin est limité à très à peu d'établissements aux côtés de l'IIBR. On se souviendra que des biologistes amateurs ont été arrêtés au Royaume Uni en janvier 2003 alors qu'ils essayaient de préparer du Ricin.


La tendance nouvelle et dangereuse dans la recherche d'Armes Biologiques à l'IIBR est le développement des incapacitants qui paralysent, désorientent, entraînent des mouvements incontrôlables et de graves douleurs d'estomac. La plupart de ces incapacitants ont des antidotes qui soignent les dommages causés. Ces incapacitants ont été et sont utilisés contre les Palestiniens pendant l'Intifada.

Une importante collaboration sur la recherche sur les armes biologiques existe également avec l'Allemagne et la Hollande. C'est probablement la raison du silence officiel hollandais sur l'accident mortel d'Amsterdam.

La coopération avec les Etats-Unis est complètement libre. Les "Programmes communs de Recherche Médicale, Biologique et Nucléaire pour la Défense" énumèrent ouvertement les coopérations avec Israël sur des neurotoxiques et des convulsifs sous prétexte de trouver des antidotes.
Il est facile de comprendre que pour trouver un antidote, il faut identifier le poison lui-même.
Le Dr Avigdor Shafferman, directeur de l'IIBR, contribue fréquemment à ce programme. (voir www.acq.osd.mil/cp/nbc98/annexd.pdf)- Annexe D.

La Commission Préparatoire de l'Organisation pour l'Interdiction des Armes Chimiques à La Haye (OPCW) ferme les yeux sur les activités criminelles israéliennes. De façon ironique, les chercheurs israéliens guident l'OPCW sur les méthodes pour détecter les armes chimiques.

Les chercheurs israéliens, R Barak, A Lorber et Z Boger de l'IIBR, CHEMO Solutions et Rotem Industries ont proposé des moyens de détection des agents de guerre chimique.

Aucune institution internationale ne semble être disposée à appliquer ces méthodes à Israël

Le mécanisme pour effectuer cette surveillance est disponible. Le Centre Médical des renseignements des Forces Armées américaines a les moyens d'inspecter les laboratoires suspects. Mais il est peu vraisemblable de voir une équipe d'inspecteurs dirigée par l'américain Blix fouiller les chambres secrètes de l'IIBR.

Ceci ne s'applique cependant pas aux scientifiques consciencieux. Le Professeur Keith Yamamoto, de l'Université de Californie et le Dr Jonathan King du MIT ont critiqué la recherche américaine sur les armes biologiques et ils ont montré que tenter de modifier des toxines (comme le fait l'IIBR) peut difficilement être considéré comme de la recherche "défensive".
Mais qu'Israël fasse l'objet d'une telle critique ne semble pas être pour demain.



LES VICTIMES PALESTINIENNES :

Les crimes biologiques perpétrés contre les Palestiniens à Acre et à Gaza en 1948 sont toujours d'actualité.

En 1997, les agents du Mossad ont tenté d'assassiner Khaled Mish'al, le directeur du bureau politique du Hamas à Amman.

Le Roi Hussein était furieux face à la violation flagrante de la souveraineté de la Jordanie et du Traité de Paix avec Israël. Comme la tentative a échoué grâce au garde du corps de Mish'al, Israël a envoyé une femme médecin avec l'antidote.
La toxine utilisée était probablement du SEB injecté à l'aide d'un pistolet spécial d'une portée de 50 mètres et qui a pu lui injecter la toxine dans le cou.

Les histoires sur du gaz neurotoxique utilisé sur des écoliers abondent. Voici des cas dans lesquels des armes chimiques et biologiques ont été utilisées.

Neil Sammonds énumère les cas suivants :

• des défoliants chimiques sur des récoltes palestiniennes à Ain Al- Beida en 1968, à Aqraba en 1972, à Mejdel Beni Fadil en 1978 et dans le Néguev en 2002.

• des armes chimiques, dont de l'hydrogène de cyanure, du gaz neurotoxique et des bombes au phosphore ont été utilisés dans la guerre contre le Liban en 1982.

• du gaz mortel a été utilisé sur des prisonniers palestiniens et libanais.

Mais le cas qui a été largement publicisé dans le monde entier et parfaitement documenté par plusieurs ONG internationales est l'utilisation d'incapacitants, en particulier à Khan Younis, en février 2001.
Les images des victimes se tordant de douleur dans des convulsions incontrôlables ont éclaboussé les écrans de télévision du monde entier.

James Brooks, de "Just Peace in Palestine/Israël" a fait un compte-rendu détaillé de cette attaque à l'arme biologique contre des civils chaque jour où cela s'est produit.

D'abord, les victimes ont pensé que c'était du gaz lacrymogène. Il avait une faible odeur de menthe. "Cela sentait le sucre" a indiqué une victime. Ca changeait de couleur "comme un arc-en-ciel".

Quinze minutes plus tard, la victime avait l'impression que "son estomac se déchirait, avec une sensation de brûlure (dans la poitrine), elle ne pouvait pas respirer." Puis les convulsions commençaient.
La victime faisait des bonds, gesticulait de gauche à droite, dans une sorte de crise hystérique. Certaines victimes s'évanouissaient.
La victime vomissait en permanence et ensuite la douleur revenait. Cela a duré des jours ou, pour certaines, des semaines.

En plus des nombreux rapports de la presse et des organisation pour les Droits de l'Homme, des victimes empoisonnées au gaz convulsif de Khan Younis ont été filmées par le réalisateur américain James Longley, dans un documentaire qui "jette le spectateur la tête la première dans le tumulte de Gaza occupée par les Israéliens".
Longley a compilé un document de 43 pages d'interviews avec 19 victimes du gaz, leurs parents, des infirmières et des médecins.

Ces incapacitants diaboliques ont entraîné les protestations de quelques ONG, mais c'est tout. Aucune enquête internationale ou censure d'aucune sorte, bien que cela ait été utilisé à plusieurs reprises en mars à Al-Birch, à Naplouse et en Cisjordanie et encore à Gaza, pas plus tard que le mois dernier.

Bien au contraire. Les sionistes ont orchestré une condamnation et une désapprobation de grande envergure quand, en novembre 1999, Suha Arafat, l'épouse du président, a accusé les Israéliens d'utiliser du "gaz poison" en présence de la candidate américaine Hillary Clinton.
Le sommet de l'hypocrisie et du cynisme a été atteint quand les autorités israéliennes exaspérées ont déclaré que la déclaration de Suha était "une violation du processus de paix" !

Il y a pour l'instant des effets invisibles et à long terme des toxines et des incapacitants.

Le 3 février 2003, le Dr Khamis Al-Najjar, le directeur du Centre de Recherches sur le Cancer du Ministère de la Santé à Ramallah a fait état d'une augmentation alarmante des cas de cancer, en particulier parmi les femmes et les enfants.

Le rapport couvre la période 1995-2000 et montre 3646 cas, dont plus de la moitié sont des femmes. Les cas à Gaza sont plus importants qu'en Cisjordanie.
Le rapport, citant le taux d'augmentation, prévoit que les cas tripleront dans un proche avenir.

Si l'on tient compte de la paranoïa des Israéliens au sujet de la démographie palestinienne et à en juger par leurs précédents résultats, il est possible que l'effet cumulé de l'application des toxines et des incapacitants par les Israéliens ait produit une augmentation du nombre de cas de cancer.

Une étude semblable doit encore être faite sur les foetus et les nouveaux-nés.


A PARTIR DE LA, OÙ ALLONS-NOUS ?

Israël a signé mais n'a pas ratifié la Convention sur les Armes Chimique et n'est pas membre de la Convention sur les Armes Biologiques.

Israël ne reconnaît pas l'application de la Quatrième Convention de Genève dans les Territoires Palestiniens Occupés de Cisjordanie et de Gaza, comme le fait le reste du monde. Ceci n'est pas étonnant. Israël viole toutes les règles.

L'article 147 de la Convention de Genève stipule que "causer intentionnellement de grandes souffrances ou de porter des atteintes graves à l'intégrité physique ou à la santé (des civils) est une "grave infraction", qui, selon l'article 146, requiert que "chaque Partie contractante aura l'obligation de rechercher les personnes soupçonnées d'avoir commis, ou d'avoir ordonné de commettre l'une ou l'autre de ces infractions graves, et elle devra les déférer devant ses propres tribunaux, quelle que soit leur nationalité." Si cela était appliqué, Sharon et ses officiers seraient derrière des barreaux dans un tribunal Belge et pour longtemps.

Il y a pléthore de conventions qu'Israël a constamment violées, à commencer par le Protocole de Genève de 1925 sur le gaz toxique jusqu'à la Convention sur la Prohibition du Développement, de la Production, du Stockage et de l'Utilisation des Armes Chimiques de 1993.

Dans ce contexte, cela ressemble à un simulacre de justice que d'envoyer des centaines d'inspecteurs dans les ateliers détruits et les maisons privées en Irak, alors que d'énormes tonnes d'armes de destruction massive les regardent en Israël.

Peut-être que les 10 millions de personnes dans 600 villes du monde entier qui ont manifesté contre la guerre en Irak les 15 et 16 février essayaient de souligner cette ironie en refusant cette guerre. Certaines pancartes le disaient en termes clairs.

Peut-être que des voix en Israël devraient être écoutées plus attentivement.


Le maire de Nes Ziona, ville située à seulement 10 kilomètres du centre de Tel Aviv, se plaint que la proximité de l'IIBR de sa ville pose un grand danger à la population, en cas d'accident. Il a raison.

Le Comité Scientifique de la Knesset fait état de 22 victimes dont trois sont mortes au cours de ces 15 dernières années. Mais les autres étaient des cas bénins.

Quelle serait la situation si un gros accident se produisait un jour de vent, causant l'explosion de tonnes d'éléments toxiques et leur évaporation dans le ciel, dans une zone très peuplée, où vivent trois millions de personnes sur un secteur d'à peine de 1.000 Kms², ce qui fait 35 Km sur 35 Km ?

Ben Gurion, alors qu'il mijotait ses pires plans pour "exterminer" les Arabes, n'a pas imaginé ce scénario dans ses rêves les plus fous.
Palestine - 08-01-2007
Article paru en anglais dans l'édition d'Al-Ahram le 27 février 2003. L'auteur est le président de la Palestine Land Society, Londres.
http://www.ism-france.org/news/article.php?id=6041&type=analyse&lesujet=Armement%20israélien
Source : http://weekly.ahram.org.eg/
Traduction : MG/MR pour ISM

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5-4 Rémi Kauffer : Les dérapages du nationalisme juif.

Le sionisme politique est une idée laïque, mais qui met à l'ordre du jour, à partir de la fin du XIXe siècle, la création d'un Etat juif. Cette aspiration naît dans les pays de l'Europe de l'Est, notamment en Russie et en Pologne, où les pogroms sont fréquents. Son théoricien emblématique, Theodor Herzl, journaliste autrichien, forge ses convictions au moment de l'affaire Dreyfus, où il considère que, même dans un pays comme la France, la politique d'assimilation pratiquée depuis la Révolution a échoué. Depuis l'origine, deux courants coexistent. L'un politique, qui veut la création d'un Etat juif, mais pas forcément en Palestine, l'autre, réalisateur, qui prône l'installation immédiate dans la Palestine « historique », notion à déterminer. Retour aux sources.
Le 9 avril 1948, cent trente combattants nationalistes juifs lancent l'assaut contre le village arabe palestinien de Deir Yassine. Ces jeunes appartiennent soit à l'Irgoun Zvai Leumi (IZL, « Organisation militaire nationale »), soit aux Lohamei Herout Israel (Lehi, « Combattants pour la liberté d'Israël »), deux groupes armés issus du courant sioniste « révisionniste », le plus intransigeant en matière de revendication territoriale.

Au coeur d'un conflit israélo-arabe en passe de se généraliser, la prise de Deir Yassine, site stratégique situé en surplomb de la route entre Tel-Aviv et Jérusalem, a été décidée en plein accord avec la Haganah, l'armée juive officielle dans laquelle l'IZL et le Lehi sont précisément en cours d'intégration (l'Etat hébreu sera proclamé un mois plus tard, le 14 mai, et les Forces de défense d'Israël, Tsahal, aussitôt après).

L'assaut tourne à l'hécatombe : près de deux cents habitants, hommes, femmes et enfants, sont assassinés à l'arme automatique et même au poignard. Le massacre a-t-il été prémédité ? En partie au moins, l'IZL et le Lehi n'ayant jamais caché leur intention de faire un exemple. D'autres facteurs ont également pu jouer : le caractère implacable des combats entre juifs et Arabes ; la résistance inattendue des défenseurs de Deir Yassine, qui ont tué cinq des assaillants et en ont blessé trente autres ; le manque de discipline militaire de membres de l'IZL ou du Lehi formés au terrorisme urbain, non à la guerre proprement dite ; l'accident du véhicule haut-parleur de l'Irgoun chargé d'exhorter les habitants à quitter leur village avant qu'il ne soit trop tard et dont les appels sont restés inaudibles...

Quoi qu'il en soit, Deir Yassine marque un tournant. Le crime éclabousse la cause israélienne en même temps qu'il pousse nombre de villageois arabes à quitter leurs maisons. La vengeance ne tarde d'ailleurs pas à se manifester : le 13 avril, 70 scientifiques, médecins, infirmières et hommes d'escorte juifs périssent dans leurs véhicules incendiés...

L'exécutif sioniste et la Haganah condamnent le massacre de Deir Yassine, dont ils font porter la responsabilité sur les seuls IZL et Lehi. Déclarations pas vraiment surprenantes pour qui connaît l'hostilité opposant de longue date le sionisme révisionniste, politiquement à droite (son héritier actuel est le parti israélien Likoud), au sionisme socialiste majoritaire (ses héritiers sont les travaillistes israéliens).

L'antagonisme remonte à l'entre-deux-guerres, quand Vladimir Zeev Jabotinsky rompait avec l'Organisation sioniste mondiale, coupable selon lui d'abandonner le projet d'Eretz Israel par faiblesse vis-à-vis de l'Angleterre (celle-ci exerçait un mandat de la Société des nations, ancêtre de l'ONU, en Palestine depuis la fin de la Grande Guerre). Face au courant sioniste socialiste, émerge ainsi dès 1925 le sionisme révisionniste. Nombreux - plusieurs dizaines de milliers dans les pays d'Europe de l'Est -, les militants de son organisation de jeunesse, le Betar, défilent alors en uniforme brun et rouge, montent des camps d'été où règne une discipline sévère et s'attirent les pires critiques des sionistes socialistes qui les présentent comme des « fascistes ». En juin 1933, l'assassinat à Tel-Aviv d'un dirigeant sioniste socialiste, Haïm Arlosoroff - crime non élucidé mais attribué aux révisionnistes par leurs adversaires - ne fait qu'aggraver cette situation de tension.

Depuis les années 1920, les sionistes socialistes - en l'occurrence le puissant syndicat juif Histadrouth - se sont dotés de la Haganah. Ce bras armé mène une guerre souterraine implacable contre les groupes arabes décidés à stopper la progression des colonies agricoles juives. Or, en avril 1931, Avraham Tehomi, le chef de la Haganah de Jérusalem, fait scission, créant la Haganah Bet, aussi appelée Irgoun B. Celle-ci se rapproche des révisionnistes. En 1937, l'Irgoun B éclate, Tehomi réintégrant la Haganah tandis que de jeunes dirigeants résolus, Moshe Rosenberg, Hanoskh Kalaï, David Raziel ou Avraham Stern, créent l'IZL. Bientôt dirigée par un ancien officier anglais, Robert Bitcker, cette nouvelle organisation se lance dans des hold-up très mal perçus par la population juive. Désavoué par Jabotinsky, Bitcker est remplacé par son adjoint, Moshe Rosenberg, puis par David Raziel.

Tandis que les affrontements entre Arabes et juifs se multiplient, l'Irgoun bascule dans le terrorisme urbain : bombes dans des souks ; attentats contre des autobus transportant des ouvriers arabes, contre des cinémas ; incendie de la gare de Tel-Aviv. Simultanément, les membres de l'organisation commencent à s'en prendre à des policiers britanniques du contre-espionnage. Changement de donne à l'été 1939, avec l'invasion de la Pologne par Hitler. Approuvé par Jabotinsky, David Raziel propose de suspendre ses opérations anti-anglaises pendant toute la durée de la guerre. A l'été 1940, cet arrêt des hostilités conduit à une nouvelle scission entre l'IZL et l'Etzel Be Israel (Organisation militaire nationale en Israël) d'Avraham Stern, un exalté qui ne connaît pas les demi-mesures. Baptisée « groupe Stern » par les Anglais, l'Etzel Be Israel refuse tout accommodement avec la puissance mandataire et cherche même - en vain - à négocier avec les autorités allemandes à la fin 1940, Stern s'étant persuadé que Hitler voulait expulser les juifs d'Europe mais pas les détruire ! Attaques de banques, meurtre par erreur de deux policiers juifs : de quoi asseoir un peu plus la réputation de jusqu'au-boutistes irresponsables des hommes de l'Etzel Be Israel. Pour parachever le tout, Avraham Stern lui-même, repéré par les Anglais, est froidement abattu le 12 février 1942.

L'Etzel Be Israel très mal en point et dirigée par un triumvirat où se distingue Yitzhak Yzernitsky (bientôt Yitzhak Shamir), la parole est à l'Irgoun. Un nouveau venu, Menahem Begin, en a pris le commandement. Il restructure l'organisation, la dote d'un programme politique. Ulcéré par l'attitude des Britanniques qui, malgré les nouvelles dramatiques d'Europe, refusent d'ouvrir la porte de la Palestine aux immigrants juifs, Begin lance l'Irgoun dans une campagne d'attentats anti-anglais limités aux objectifs non militaires, guerre contre le nazisme oblige. Le 12 février 1944, trois explosions simultanées détruisent les bureaux du service d'immigration de Jérusalem, Haïfa et Tel-Aviv. Le début d'une longue série...

De son côté, le groupe Stern n'a pas désarmé sous son nouveau nom de Lehi. D'abord, il tente d'abattre Harold McMichaels, le haut-commissaire britannique en Palestine. Puis, le 9 novembre 1944 au Caire, deux de ses membres assassinent lord Moyne, haut-commissaire britannique pour le Moyen-Orient. Dirigé par David Ben Gourion, l'exécutif sioniste profite de la vague de désapprobation qui s'ensuit pour frapper sous la ceinture son principal rival, l'Irgoun, beaucoup plus dangereux que le groupusculaire Lehi. C'est l'opération « Saison », qui voit les amis de Menahem Begin dénoncés aux autorités britanniques et traqués par la Haganah...

Nouveau revirement à l'automne 1945 quand, sur consigne de Ben Gourion installé à Paris, la Haganah passe à son tour à l'action armée anti-anglaise. Nonobstant les terribles querelles du passé, un front commun à l'enseigne du Mouvement de la révolte hébraïque (MRH) se constitue entre Haganah, Irgoun et Lehi qui, sous l'influence de son maître à penser Nathan Yelin-Mor, adopte une idéologie pour le moins originale, mixture d'intégrisme nationaliste et de gauchisme anti-impérialiste. Ponctués de représailles britanniques, les attentats reprennent de plus belle : sabotages (ponts, stations radar, voies de chemin de fer), incendies de terrains d'aviation, raids, mitraillages...

Sans compter l'hôtel King David. Depuis les débuts du MRH, l'Irgoun préconise de s'en prendre à cet établissement de Jérusalem dont l'aile sud abrite le quartier général de l'administration britannique en Palestine. Mais la Haganah refuse avec constance jusqu'au jour où, des documents compromettants de l'exécutif sioniste ayant été saisis par les Anglais, elle fait brutalement volte-face. D'accord, dit son représentant Yitzhak Sadeh. Pour être bien sûr de la destruction des documents, il aurait même proposé que l'appel téléphonique anonyme invitant les Anglais à évacuer l'établissement intervienne 15 minutes avant l'explosion, et non 45 comme prévu par l'Irgoun. On transige à 30 minutes mais le 22 juillet 1946 à 12 h 37, l'explosion provoque un carnage : plus de 100 morts. Aussitôt, l'exécutif sioniste désavoue l'attentat ! Ecoeurement de Begin qui, partagé entre sa certitude messianique que la cause lui confère le droit de tuer et son refus moraliste de verser inutilement le sang, n'a sans doute jamais voulu un massacre sur une si grande échelle.

Début 1947, l'Irgoun à son apogée compte entre 600 et 1 000 opérationnels, plus 5 000 militants dans les réseaux de logistique et de soutien. Elle poursuit ses attentats et répond coup pour coup aux autorités britanniques. Ses militants sont fouettés ? Des officiers de Sa Majesté kidnappés subiront le même sort. Pendus ? Deux sergents du contre-espionnage anglais connaîtront à leur tour l'horreur de la potence. L'organisation ne sera dissoute qu'à la fin juin 1948, après le massacre de Deir Yassine. Mais juste avant, le 21 juin, elle perd encore une vingtaine de militants tués par la Haganah lors de l'affaire de l'Altalena (l'Irgoun, maître d'oeuvre de l'opération, réclame un quart des armes transportées par ce cargo en provenance de France pour ses combattants, le reste allant à la Haganah). Cette proposition est rapidement rejetée par Ben Gourion qui, au nom de l'unité nationale, prend la décision de faire couler le navire.

Reste le Lehi. L'une de ses spécialités : les colis piégés. Le groupe en expédie un en Angleterre, à l'adresse personnelle du major britannique Roy Farran, membre d'un groupe contre-terroriste, l'Escadron Q. Le 3 mai 1948, son frère Rex l'ouvre. C'est lui qui meurt : le colis était marqué « R. Farran ».

Quatre mois plus tard, le même Lehi hausse à nouveau le ton en assassinant, le 17 septembre, Folke Bernadotte, médiateur de l'ONU jugé trop favorable aux Arabes, et l'un de ses collaborateurs français, le colonel Paul Sérot. Véritablement décidé à en finir, Ben Gourion qualifie alors le groupe d'« organisation terroriste », de « milice de la bourgeoisie juive » et d'« organisation anti-ouvrière à aspects fascistes ». Ce qui n'empêche pas le Lehi, passé dans la clandestinité, de réapparaître début 1949 sur le terrain politique en créant son propre parti. Une page sanglante se tourne...
Membre du comité éditorial d'Historia, Rémi Kauffer, auteur d'un roman sur la Résistance, Le Réseau Bucéphale (Le Seuil, 2006) vient de collaborer à l'ouvrage collectif L'Histoire secrète de la Ve République (La Découverte)
Comprendre

Sionisme révisionniste
En 1925, Vladimir Zeev Jabotinsky (1880-1940) crée le Parti révisionniste, organe central de la droite nationaliste sioniste. Ce mouvement revendique l'existence d'un Etat juif sur les deux rives du Jourdain et la Transjordanie.
Ses partisans s'opposent au sionisme de gauche, dont les héritiers sont les travaillistes de la Knesset.
Menahem Begin, patron de l'Irgoun
Né en 1913 à Brest-Litovsk, étudiant en droit, commissaire de la branche polonaise du Betar, le mouvement de jeunesse de l'organisation sioniste « révisionniste » de son maître à penser, Vladimir Jabotinsky. En 1939, échappant aux nazis, il parvient à passer dans la partie de la Pologne occupée par les Soviétiques. Expédié au goulag pour son engagement sioniste, il est libéré en juin 1941 et s'engage dans l'armée nationale polonaise que lève le général Wladislaw Anders. Son unité transférée en Palestine, il est démobilisé en 1943 et adhère sur-le-champ à l'Irgoun, dont il prendra la direction. En février 1944, Begin annonce la reprise de la lutte armée contre la présence britannique. Cette décision lui vaut les foudres de l'exécutif sioniste officiel dirigé par celui qui va devenir sa bête noire - et réciproquement -, David Ben Gourion, jugé trop complaisant envers la puissance coloniale britannique. Entre novembre 1944 et septembre 1945, la Haganah lance l'opération "Saison" : des militants de l'Irgoun sont dénoncés à la police, d'autres séquestrés voire torturés, des dépôts d'armes saisis. Mais, en refusant toute action de représailles, Begin sauve la paix civile à l'intérieur de la communauté juive, attitude modérée qui lui attire de nombreuses sympathies. Le chef de l'Irgoun ne sort de la clandestinité qu'en mai 1948, au moment de la proclamation de l'Etat hébreu. Fin juin 1948, il accepte la dissolution de son organisation mais, dès août, il crée un parti politique se réclamant du sionisme révisionniste, le Hérout (« Liberté », ancêtre de l'actuel Likoud). En mai 1977, l'ancien dissident sioniste propulse la droite israélienne au pouvoir et devient Premier ministre jusqu'à sa démission en septembre 1983.
Les zélotes, miliciens de la foi

Les écrits de l'historien juif romanisé Flavius Josèphe (37 apr. JC-100) constituent la source quasi unique d'information sur ces précurseurs du terrorisme organisé. Intégristes juifs influents proches du courant pharisien, les zélotes militent contre la domination romaine. Vers l'an 6 après J. C., ils passent à la lutte armée sous la houlette de leur chef, Juda de Galilée. Leur revendication : l'indépendance aussi bien politique que religieuse. Leur obsession : la pureté individuelle, qui seule confère la légitimité de tuer au service de la cause. Leurs victimes : les « collabos », mais aussi les juifs à la pratique religieuse relâchée. Leur méthode : l'égorgement au poignard dans les lieux publics, qui frappe les esprits - « guerre psychologique » - en même temps que les corps, d'où leur nom romain de « sicaires » (de sicarius, celui qui tue au poignard). Mais ils s'emploient également à brûler les documents d'archives, titres de propriété, relevés fiscaux et reconnaissances de dettes, forme d'action originale qui leur assure une forte popularité. Il semble en effet que les zélotes se soient appuyés sur les classes défavorisées quitte à mécontenter les plus riches. Après un demi-siècle de mise en sommeil, l'organisation, dirigée semble-t-il par des descendants de Juda de Galilée, réapparaît vers 60 pour mener une lutte acharnée jusqu'à la destruction du Temple de Jérusalem par les Romains. Dernier épisode de ce combat sans merci, le long siège de la forteresse de Massada au cours duquel les 960 défenseurs zélotes conduits par Eleazar ben Yaïr vont préférer le suicide collectif à la capitulation.

Yitzhak Shamir, chef du Lehi